Notre TCF Jean G. nous livre une réflexion sur le caractère fragile de la Loge et même de l’obédience, si des démons variés de pathologie en prennent possession. Une leçon de vigilance pour les maintenir en « bonne santé ». Il écrit :
Rien n’est jamais acquis. Une Loge qui a su résister, se refonder, n’est pas à l’abri de revoir les mêmes démons revenir vers elle et en elle. À l’extérieur, les dangers la guettent. Une nouvelle obédience naît qui trop souvent oublie ses messages originels de modestie, de respect des rites et des adeptes. Au lieu d’être au service des Frères, elle prétend les réduire à son service. L’appareil devient prépondérant et il s’agit de le sauver même au détriment de ses mandants. L’exotérique l’emporte sur l’ésotérique, disait déjà René Guénon.
L’obédience n’est rien. Elle représente et aide les Frères. Elle doit respecter la diversité, la souveraineté des Loges, la liberté des Frères. Il n’y a pas d’autre délégué de Loge ou de référent (provisoire d’ailleurs et pour la durée de son mandat) que le Vénérable-Maître. Lui-même dépositaire des pouvoirs temporel et spirituel, conférés par la Loge, anime plus qu’il ne dirige la Loge. D’ailleurs « trois la dirigent », est-il précisé dans les rituels. L’obédience s’octroie le pouvoir de consacrer une Loge. Cette concession faite à l’obédience par les Loges, est plus symbolique que réelle, et n’est valide que tant que l’obédience observe des comportements dignes de cette confiance. En fait elle ne peut prétendre s’immiscer dans la réalité des rituels. Elle peut offrir des espaces de rencontre, des lieux de vie, mais sans en retour prétendre soumettre les volontés, les Frères… D’ailleurs quand nous disons volontés, il est important d’identifier à qui appartiennent ces volontés ?
Qui cachent-elles sinon des Frères qui se sont fait élire certes, mais essaient de s’incruster, même après leur mandat, pesant toujours sur l’institution au travers de clans qu’ils installent pour finalement, oubliant la défense des principes fondateurs, persister dans un pouvoir dérisoire, objet d’une jouissance en lui-même, pour lui-même. Ces connaisseurs des appareils, à la compétence entrepreneuriale acquise dans le monde profane, ne sont capables que de répliquer dans le monde sacré des schémas qui ne doivent pas y avoir cours.
Ce qui est valable à l’échelle de l’obédience se répète parfois à l’intérieur même de la Loge. Nous en sommes souvent étonnés. Cette surprise est le fruit de notre manque de vigilance, de notre manque de sagesse, de notre paresse à discerner ce qui émerge petit à petit et que nos yeux refusent de voir et qui pourtant était devant nous. Elle peut se traduire par une querelle entre anciens et modernes, ou à l’intérieur du groupe des anciens. Les anciens souhaitent parfois accaparer un « pouvoir » qui leur aurait échappé, qui n’aurait jamais dû être, ou un clan animé par quelque ancien prétendant l’emporter sur un autre.
Le rôle des anciens est « de décroitre pour que les initiés nouvellement croissent ». Ils n’abandonnent pas. Ils répondent aux questions et en posent. Une Loge saine est gouvernée par des jeunes Maîtres qui arrivent à maturité. Seul l’office d’orateur requiert le plus souvent l’occupation par un ancien, quoiqu’il ne faille pas en faire une règle absolue. La Loge a tout à gagner que les offices soient tenus par des jeunes Maîtres. Les anciens sont des acteurs humbles d’une pédagogie permanente mais non invasive. À travers des travaux et plus encore à travers leur attitude, ils apportent à la Loge, mais sans jamais prétendre manipuler un Vénérable-Maître ou les Frères en général.
Tout cela est très difficile à respecter. La limite entre les attitudes positives et négatives est très ténue, et une lutte d’abord à l’intérieur de chacun de nous est à l’œuvre pour évaluer en permanence l’intérêt avant tout de la Loge.
JG, 05/2023
Source : Blog de La Grande Loge Indépendante de France (GLIF)
dommage que ce texte ne se débarrasse pas du concept d’obédience, source de beaucoup de maux ( et de mots )