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RENÉ GUÉNON, UN ANTI-MODERNE CONTRE L’ÉSOTÉRISME


Attiré dans un premier temps par la Franc-Maçonnerie et l’ésotérisme chrétien, René Guénon a fui vers l’orient pour se convertir à L’Islam. Il a fui la modernité pour son éloignement de la tradition et le nihilisme occidental aboutissant à une négation totale de l’ésotérisme.

Nihilisme et ésotérisme

Si le terme « ésotérisme » n’apparaît dans la langue française qu’à la fin du XVIIIe siècle, les courants de pensée qu’il englobe sont bien plus anciens. Dans son essai La Crise du monde moderne, René Guénon affirmait : « On peut identifier, depuis l’Antiquité en Occident, certaines écoles discrètes, généralement mal connues du grand public. Ces écoles, qui n’étaient pas uniquement philosophiques, exprimaient leurs doctrines à travers des symboles qui semblaient obscurs Guénon explique que ces savoirs n’étaient délivrés qu’aux adhérents ayant pris des engagements spécifiques après que leur discrétion et leurs capacités intellectuelles aient été préalablement testées. Et, comme le rappelaient les journalistes de L’Express ce matin, les différentes formes d’ésotérisme se sont manifestées à travers les sciences occultes du Moyen Âge. Guénon a longuement analysé ces doctrines médiévales. « Lorsque l’on évoque l’intellectualité de cette époque, affirma-t-il, il est essentiel de reconnaître qu’il peut y avoir des éléments méconnus. »

L’ésotérisme de René Guénon

Dans son essai Autorité spirituelle et pouvoir temporel (1929), René Guénon soutient que l’origine de l’ésotérisme est intimement liée au déclin de l’autorité spirituelle au profit d’une force exclusivement matérielle. Selon Guénon, cette philosophie « profane » a pris son plein essor lorsque seul l' »exotérisme » prévalait, aboutissant à une négation complète de « l’ésotérisme », sujet d’ailleurs mis en avant par L’Express en une ce matin. Ainsi, à partir de ses travaux sur la franc-maçonnerie, René Guénon avait identifié plusieurs enjeux liés à l’ésotérisme. Un expert en la matière témoigne : « Il envisageait son action sous un double aspect : d’une part, amener les maçons à mieux comprendre leurs principes et les fondements de leur hiérarchie chevaleresque et, d’autre part, persuader les catholiques qu’ils avaient tort de s’opposer à la maçonnerie. » Contrairement à l’ésotérisme traditionnel qu’a étudié Guénon, et qui était centré sur la quête d’une vérité cachée, l’ésotérisme contemporain se focalise davantage sur l’individu et son bien-être. Il se confond souvent avec le développement personnel, où la recherche du potentiel inexploré et l’aspiration à s’améliorer dominent. Ainsi, comme l’ont souligné les journalistes de L’Express ce matin, la montée fulgurante du hashtag « Cartomancie » avec ses 1,8 milliard de vues illustre à quel point l’ésotérisme a pris une tournure différente à notre époque.  Thierry Jobard, libraire à Strasbourg et essayiste, exprimait ce matin ses préoccupations quant à l’engouement croissant pour les croyances ésotériques en Occident. Selon lui, elles pourraient ébranler les fondations de nos débats démocratiques en privilégiant l’émotion et le ressenti au détriment de la réflexion rationnelle. Son intérêt pour la question provient de ses observations en tant que libraire. Il a constaté une augmentation notable des ventes et publications liées à l’ésotérisme, avec l’apparition de nouvelles tendances comme la sorcellerie, le chamanisme et le féminin sacré.

Ésotérisme et raison

Adoptant une pensée profondément rationnelle, Guénon conclut que l’homme moderne tend à nier toute spiritualité supra-rationnelle, similaire à celle qu’il décèle lors de son étude de la culture hindoue. Il affirme : « La tradition indienne présente une telle unité qu’il est presque impossible de la scinder, même en deux doctrines ou perspectives complémentaires. » Ainsi, selon Guénon, la doctrine métaphysique elle-même ne revêt pas véritablement d’ésotérisme autre que celui intrinsèque à toutes les doctrines de cette nature. « Tout individu peut accéder à cet enseignement, à condition de posséder les qualifications intellectuelles nécessaires pour en bénéficier. Cette possibilité d’accès est relative à l’enseignement et non à certaines fonctions spécifiques pour lesquelles d’autres qualifications pourraient être exigées. » De ce fait, chaque personne, selon ses aptitudes intellectuelles, est en mesure de comprendre et d’assimiler l’enseignement à différents niveaux

A.S.: