QUAND UNE GRANDE LOGE DEVIENT PETITE !

Une nuit froide de février 1689, un Pasteur protestant blottit clandestinement  son jeune enfant au fond d’un  tonneau, dans le ventre d’un bateau commercial, en partance de La Rochelle pour l’Angleterre. Pour le sauver de la révocation de l’Edit de Nantes. Recueilli à son arrivée à Londres, Jean-Théophile Désaguliers – c’est son nom – deviendra à son tour plus tard, non seulement Pasteur, mais un  brillant scientifique adjoint d’Isaac Newton. Et pionnier avec James Anderson de la franc-maçonnerie spéculative, en 1717. Partant, promoteurs tous les deux de la Liberté. C’est à dire de l’Egalité morale et de  la Fraternité universelle,   que nous prônons aujourd’hui en loge !

Trois siècles après, en 2017, coup de tonnerre dans un ciel serein :  une  prestigieuse loge maçonnique de cette belle région d’Aquitaine, la loge  Anglaise 204,  – fédérée à La Grande Loge de France –  décrète sur l’ ordre de cette dernière, qu’elle doit donc lui réserver cette  fraternité en exclusivité ! Contrevenant ainsi au credo même de la franc-maçonnerie, cette Grande Loge –  glorieuse, ô combien en une autre période  –  affiche soudain par le biais de son encadrement passager –  une  misérable petitesse en interdisant à ses membres de fonder et d’adhérer à toute structure indépendante,  – en l’occurrence, une loge de recherche humaniste –  précisément baptisée du nom de l’enfant glorieux du pays « Jean-Théophile Désaguliers. Puis encore – fait qui ne la concerne ni ne la regarde en aucun cas – elle veut maintenant, par décret,  empêcher ses mêmes membres d’adhérer, s’ils  le souhaitent,  à un Suprême Conseil naissant indépendant, non « souché » sur une obédience (Le Suprême Conseil d’Aquitaine, mixte de surcroît…suprême  sacrilège !).

Décidément – qui aurait pu l’imaginer – la sacro-sainte liberté d’association (Loi 1901, dont les francs-maçons ont été les farouches contributeurs) peine à s’inscrire dans  les petits esprits qui modifient à leur aise les grandes Constitutions de certaines instances maçonniques !  Même si, lors de chaque tenue,  elles font clamer  rituellement  haut et fort à leurs membres, la trilogie républicaine LIBERTÉ-ÉGALITÉ-FRATERNITÉ.

Il est tout de même bon de répéter que tout à fait légalement – au simple regard de la loi française –  qu’il n’est besoin d’aucune patente (ce document mythique, voire douteux, d’un autre temps !) ni d’être «reconnu », ni cautionné,  par une autre instance homologue, pour construire une loge maçonnique, sinon une  simple déclaration administrative en Préfecture (Association déclarée Loi 1901).

S’il s’agit de reconnaissance, elle devrait  surtout se manifester en maçonnerie, non par de la méchanceté, de la jalousie, de l’inféodation ou de la médisance ( le comble pour une association dite fraternelle !)  mais avant toute  production paperassière, par le respect et même de l’admiration ! Pour des équipes courageuses de frères et de sœurs qui – s’extrayant de la répétitivité ambiante – ont le cran d’ouvrir et de consacrer des loges à cette « humanitude », avec une parole neuve, dont la France et le monde ont tellement besoin, en ce temps de nouveau tragique !

Serions-nous revenus à l’époque de la délation, manie bien française, que, vieux maçon maintenant,  j’ai eu le malheur de vivre ?

Ce souffle bienfaisant d’ouverture est irréversible et se multiple avec bonheur non pour concurrencer, mais pour fertiliser.  Et se ranger aux côtés de  ces instances obédientielles, voire les réveiller, les rappeler à leur mission. N’est-il pas inquiétant qu’elles  osent désormais s’intituler « puissances maçonniques » en devenant, avant tout,  des Sociétés Civiles Immobilières ?! Alors que leur visée initiale (et initiatique !) était la philanthropie,  elles sont passées – informatique impose –   sans vergogne de la spiritualité à la matérialité, oubliant trop souvent le vrai sens de la première (« Spiritualité » appartient à la famille latine spir,  indiquant avec le souffle, c’est à dire la vie du corps et de l’esprit,  respiration, expiration, inspiration).

Aucune loge, aucune obédience (même si le mot contient « obéissance » !), aucun Suprême Conseil,  n’a le droit d’instituer une police d’appartenance en son sein ni  de se créer une confortable  « clientèle captive » ! Ethique oblige ! (Jurisprudence du tribunal de Nice – Violation de la liberté d’association – 2 octobre 2001).

Le prochain Convent 2018 de la GLDF osera-t- il valider un décret qui lui est imposé d’avance,  par un Conseil Fédéral fâcheusement soumis ?

Au secours, Jean-Théophile Désaguliers, reviens ! Réapprends-nous LA LIBERTÉ ! D’être, de faire, d’aimer !

Le seul vrai Suprême Conseil est celui que chacun porte en soi : sa conscience !

                                                                          JUSTE DU QUERCY