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POURQUOI LES FRANCS-MAÇONS « CONSTRUISENT-ILS » DES TEMPLES ?


Le symbolisme maçonnique est traversé par un thème récurrent : l’architecture et la construction. Ce thème nous offre des perspectives profondes sur le développement personnel. Pour comprendre la signification de cette métaphore, nous devons d’abord examiner l’histoire de la franc-maçonnerie telle qu’elle a évolué depuis les guildes de tailleurs de pierre qui ont construit des cathédrales et des châteaux à l’époque médiévale. Ces maçons opératifs ont transformé leur métier physique en enseignements philosophiques, où leurs outils et leurs pratiques sont devenus des symboles de développement moral et spirituel.

Les fondements du progrès maçonnique

Chaque franc-maçon progresse à travers trois degrés – apprenti, compagnon et maître maçon – chacun offrant son propre ensemble de leçons et de symboles qui se complètent les uns les autres, un peu comme l’apprentissage d’un métier pratique. Au premier degré, on découvre le concept de la pierre de taille brute, une pierre non travaillée représentant notre moi naturel ou non initié. Au fur et à mesure de la progression, on découvre la pierre de taille parfaite, la pierre finie représentant notre moi développé.

La Loge elle-même représente la société qui a construit le Temple du Roi Salomon, avec différents bureaux représentant des personnages historiques clés : le Maître de la Loge représentant le Roi Salomon, soutenu par le Surveillant Supérieur représentant le Roi Hiram de Tyr, et le Surveillant Junior représentant Hiram Abiff. Cette structure divine fournit une métaphore globale de notre travail en tant que francs-maçons spéculatifs ou philosophiques, où chaque maçon construit son propre temple de caractère – un processus permanent et perpétuel englobant à la fois le travail spirituel et moral interne et les actions et comportements externes.

Pertinence moderne et construction du caractère

Dans le contexte actuel, ces métaphores de construction continuent de résonner. Le développement personnel est considéré comme un processus architectural mettant l’accent sur l’amélioration graduelle et méthodique, soutenu par des outils, des ressources et des méthodes essentiels pour construire notre temple métaphorique. Cette approche systématique de la construction du caractère a été affinée au fil des siècles.

Beaucoup entrent dans la Franc-Maçonnerie en pensant que cela ne fera qu’ajouter à leur caractère, mais ils découvrent au cours de la cérémonie d’initiation que pour construire quelque chose, il faut d’abord le détruire. Ce processus initial d’humilité exige une profonde introspection, nous enseignant que ce que nous avons accompli et possédé dans le monde quotidien devient secondaire par rapport à notre développement intérieur. La cérémonie d’initiation démontre que la démolition n’est pas une destruction mais plutôt une préparation à une fondation plus solide, qui soutiendra une structure parfaite dans toutes ses parties et honorable pour le constructeur, symbolisant notre divin Créateur.

Croyances et défis fondamentaux

La pierre angulaire de cette nouvelle construction est cruciale : si elle n’est pas placée correctement, toute la structure peut être compromise dès le départ. En Franc-Maçonnerie, nous apprenons à identifier nos véritables croyances fondamentales, représentées par les grands principes de l’amour fraternel, du secours et de la vérité. Pourtant, nous sommes confrontés à une lutte entre nos anciennes valeurs et les nouvelles, car la Franc-Maçonnerie fournit des principes stricts qui remettent souvent en cause notre vision du monde actuelle.

Ce processus de construction se heurte inévitablement à des résistances internes et à des oppositions externes. Nous devons reconnaître que nos habitudes passées peuvent ne pas servir notre développement futur, ce qui conduit à une lutte permanente entre notre ancien et notre nouveau moi. Cette transformation nous place souvent dans des positions inconfortables, nous poussant au-delà de ce que nous pensions possible. Lorsque nous mettons en œuvre ces nouvelles valeurs dans la vie quotidienne, notamment en ce qui concerne l’intégrité et la responsabilité, nous pouvons être confrontés à l’opposition d’une société qui ne partage pas toujours ces solides fondements moraux.

Gérer la résistance et la croissance

Les outils de travail proposés dans les trois niveaux nous apprennent à gérer les résistances internes et externes. Ces résistances, plutôt que d’être un obstacle, servent à confirmer que nous construisons quelque chose de significatif. Après tout, tout ce qui a une véritable valeur est rarement facile à obtenir : la difficulté de la tâche est souvent en corrélation avec sa valeur.

À mesure que nous maîtrisons notre propre résistance, nous commençons à remarquer que d’autres sont confrontés à des défis similaires. Il arrive un moment profond lorsqu’un constructeur se rend compte que son propre chantier est devenu un terrain d’apprentissage pour les autres. Dans la maçonnerie opérationnelle, cela peut signifier que les apprentis deviennent des artisans qualifiés au cours d’un projet. Dans la maçonnerie spéculative, cela signifie reconnaître les schémas dans les difficultés des autres et utiliser ces observations pour une croissance mutuelle.

Le miroir du développement

La cérémonie d’installation contient une instruction puissante aux gardiens : « Ce que vous voyez digne d’éloges chez les autres, vous devriez l’imiter avec soin, et ce qui vous paraît défectueux chez eux, vous devriez vous corriger. » Cet enseignement a une double nature. Lorsque nous observons des qualités admirables chez les autres, nous devrions les étudier et les intégrer dans notre propre formation de caractère. Cependant, lorsque nous percevons des défauts chez les autres, nous voyons souvent le reflet de nos propres défauts.

Prenons par exemple l’exemple d’un frère qui semble trop prudent face aux critiques potentielles. Si cela semble excessif, cela peut indiquer que nous-mêmes sommes trop insouciants quant à la prise en compte du point de vue des autres. Lorsque nous voyons quelqu’un connaître beaucoup de succès et de bonheur dans son travail, cela met souvent en évidence nos propres domaines d’insatisfaction. Cette « loi de la réflexion exponentielle » suggère que ce que nous remarquons chez les autres révèle souvent ce qui requiert notre attention en nous-mêmes.

Le double rôle de l’étudiant et de l’enseignant

Dans ce chantier de développement personnel, nous jouons tous un double rôle, celui d’étudiant et celui d’enseignant. Si certains enseignants sont des instructeurs officiels, d’autres servent de mentors officieux par leur exemple. Le processus d’apprentissage de l’enseignement approfondit notre propre compréhension et notre propre sagesse. Le mentorat est donc un miroir à double sens de la croissance, pas seulement une transmission unidirectionnelle de connaissances, mais un échange mutuel d’idées et d’améliorations.

La pièce perpétuellement inachevée

L’aspect le plus difficile de cette architecture spirituelle est peut-être que chaque maître maçon porte en lui une pièce qui reste perpétuellement en construction. Ce « paradoxe du propriétaire-constructeur » reflète ce que nous voyons souvent dans les métiers traditionnels : l’électricien dont la maison a besoin d’être refaite, le plombier dont les tuyaux ont besoin d’être réparés ou l’ingénieur informatique dont le projet personnel reste éternellement inachevé. Cette construction perpétuelle a un but : nous apprendre à identifier nos défis actuels tout en restant humbles quant à nos progrès.

La pièce inachevée reste souvent inachevée en raison de notre peur que l’achèvement puisse signifier la fin de la croissance. Cependant, cette perspective ne tient pas compte du plan supérieur du Créateur pour chacun d’entre nous. En acceptant la nécessité de travailler à l’achèvement de nos espaces inachevés, nous libérons notre plus grand potentiel de croissance.

Devenir le Temple

En fin de compte, les maîtres maçons ne parlent pas seulement de construire le temple, mais de le devenir. Au cours de notre parcours de démolition et de raffinement humble, de pose de la première pierre, d’affrontement et de dépassement de la résistance, de mentorat et d’être mentoré, et de confrontation avec nos chambres inachevées, nous subissons une profonde transformation. Ce processus change non seulement ce que nous construisons ou la façon dont nous le construisons, mais aussi qui nous sommes fondamentalement et ce que nous devenons, à la fois en tant que constructeurs et en tant que structures complètes.

La métaphore architecturale en franc-maçonnerie se révèle ainsi être bien plus qu’un simple symbole. Elle fournit un cadre global pour comprendre la croissance personnelle, le développement du caractère et l’évolution spirituelle. À travers ce prisme, nous voyons que le véritable chef-d’œuvre du travail maçonnique n’est pas le temple que nous construisons, mais le bâtisseur que nous devenons.

Source : Darren AllattDarren Allatt

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