Depuis le dimanche 05 janvier 2014, je vous invite à retrouver une rubrique régulière de Questions-Réponses intitulée « MISCELLANEA MACIONICA » (Miscellanées Maçonniques) tenue par Guy Chassagnard.
Guy Chassagnard est un ancien journaliste professionnel qui, parvenu à l’âge de la retraite, a cessé de traiter l’actualité quotidienne, pour s’adonner à l’étude de la Franc-Maçonnerie et de son histoire.
Voici la Question 7 de la Série Miscellanea Macionica.
QUESTION N° 07 : « Que dire de Pierre-Joseph Proudhon, l’anarchiste maçonnique ?«
Chacun connaît, plus ou moins bien, Pierre-Joseph Proudhon, né en 1809 à Besançon, mort en 1865 à Paris, en tant qu’anarchiste, polémiste et révolutionnaire pacifique. Et chacun se souvient, sans doute, qu’il fut imprimeur indépendant et cadre de société (!), avant d’énoncer la fameuse formule qui devait assurer sa renommée : La propriété, c’est le vol, dans l’un de ses écrits au titre particulièrement austère : Qu’est-ce que la Propriété ? ou Recherche sur le principe du droit et du gouvernement.
Ce que l’on connaît moins, c’est son entrée – le 8 janvier 1847 – en Franc-Maçonnerie. C’est pourquoi celle-ci mérite d’être contée ici, même si on ignore encore s’il fut invité à devenir franc-maçon ou s’il sollicita lui-même son admission.
Ce dont on est sûr, cependant, c’est que son cousin Melchior Proudhon était alors Orateur de la Loge Sincérité, Parfaite Union et Constante Amitié Réunies, sise à l’orient de Besançon. Avant de recevoir la Lumière, Proudhon dut ce soir là répondre par écrit aux trois questions d’usage. Si la réponse qu’il donna aux deux premières fut satisfaisante :
– Que doit l’homme à ses semblables ?
– Justice à tous les hommes.
– Que doit-il à son pays ?
– Dévouement.
La troisième jeta le trouble dans l’assistance :
– Que doit-il à Dieu ?
– La guerre !
Souvenons-nous qu’à l’époque la croyance en Dieu était une obligation majeure de la Franc-Maçonnerie française… Aussi, ne manqua-t-on pas de demander à Proudhon de s’expliquer, lors de son entrée, les yeux bandés, dans le temple. Ce qu’il fit volontiers, à sa façon habituelle de contestataire :
« Oui, nous devons faire la guerre à Dieu. Il se dit le seul Parfait. Pourquoi ne parviendrions-nous pas à la même perfection. Et jusque-là nous devons lui faire la guerre et lui prouver que, par notre travail et nos constants efforts dans la science de la vie, nous devons atteindre au même degré de perfection. »
Malgré ses propos quelque peu insolites et inattendus, Proudhon devait être rituellement initié, en la forme accoutumée, par la Loge bisontine. Retourna-t-il un jour en loge ? C’est fort douteux, à part une fois en 1861, étant toujours apprenti, dans une loge de Belgique.
Quatre décennies plus tard, le Monde Maçonnique n’en affirma pas moins dans ses colonnes que sa « brusque intervention » avait ramené les Francs-Maçons aux véritables traditions maçonniques, dont ils s’écartaient trop souvent, et rendu à l’Institution, qui s’était laissée envahir par un mysticisme déterminant, « le service de la réveiller de sa torpeur et de lui rappeler que sa tradition lui imposait d’autres tâches que de fonder une nouvelle religion ».
Longtemps auparavant, évoquant son entrée solennelle en Maçonnerie, Proudhon s’était expliqué en ces termes :
« En déclarant la guerre à tous les dieux substantiels, causatifs, verbaux, justifiants et rédimants, Elohim, Jehovah, Allah, Christos, Zeus, Mithra, etc., j’étais sans le savoir dans la pensée inconsciente de la Franc-Maçonnerie ».
Pour en savoir plus, consulter : De la Justice dans la Révolution et dans l’Église, de P.-J. Proudhon (1858).
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