Voici la question 33 de la Série« MISCELLANEA MACIONICA » (Miscellanées Maçonniques) tenue par Guy Chassagnard, ancien journaliste professionnel qui, parvenu à l’âge de la retraite, a cessé de traiter l’actualité quotidienne, pour s’adonner à l’étude de la Franc-Maçonnerie et de son histoire.
Miscellanea Macionica : Quand on est Franc-Maçon (Freemason), est-on un maçon « franc » ou un maçon « libre » (Free Mason) ?
Il faut se rendre à l’évidence, il n’y a jamais eu de francs-maçons dans les francs-métiers de l’ère des cathédrales… Et si l’on se reporte à l’œuvre d’Étienne Boileau (Règlements sur les Arts et Métiers de Paris, 1248), il y a lieu de constater que s’il existe alors une franchise pour les habitants de Genevilliers, les maçons et tailleurs de pierre de Paris en sont totalement dépourvus. Bien que selon la tradition maçonnique, l’Ordre du Temple ait possédé à Paris un établissement très important où les artisans bénéficiaient d’un droit de franchise (?), échappant ainsi aux charges du roi et de la cité. Certes, il est possible de mettre en avant l’ordonnance, postérieure, du roi Louis X le Hutin qui, en 1315, décrète sans rien prouver que « selon le droit de nature, chacun doit être franc ». Mais être franc signifie en l’occurrence être libre, et non pourvu de franchises…
Pour répondre à la question, il faut donc faire une incursion dans la langue anglo-saxonne. Souvenons-nous qu’en 1737, par exemple et pour remonter dans le passé, les francs-maçons parisiens étaient qualifiés de « frey-maçons » alors que leurs homologues londoniens se paraient du titre de « freemasons » ; ceci après avoir été des « free masons ». Free signifie en anglais : libre, ce que confirme non seulement tout bon dictionnaire, mais encore dans la langue de Shakespeare tous les textes anciens. Que lit-on d’ailleurs dans ce manuscrit qui appartient à la classe des Anciens Devoirs anglais, savoir le manuscrit William Watson, datant du XVIe siècle ?
Que « celui qui sera fait maçon devra affirmer qu’il est libre de naissance, de bonne famille, et libre de tout servage, et qu’il dispose de l’usage de tous ses membres ».
De même, en 1583, le manuscrit Grand Lodge n°1 précise-t-il que « l’apprenti sera de bonne naissance, c’est-à-dire qu’il sera né libre, et pourvu de tous ses membres, comme tout homme doit l’être ».
Être « libre » c’est à cette époque, de toute évidence, être né de bonne famille, hors des liens du servage et libéré de toute attache corporative. Ce que confirment d’ailleurs les Statuts dits de Strasbourg (1563) relatifs aux maçons du Saint-Empire germanique : « Chaque apprenti ayant terminé son temps et qui est déclaré libre, doit promettre au Métier […] qu’il ne communiquera ou ne révélera à personne le salut et l’attouchement du maçon. » Bref, être libre au temps des cathédrales ou de la Renaissance ne signifie en aucune façon, quoi qu’on puisse en dire, que l’on soit doté de la moindre franchise. Les maçons opératifs écossais, anglais, allemands ont été libres plutôt qu’être francs. Tout laisse donc à supposer qu’il en a été de même pour les maçons de France. A moins de pouvoir prouver le contraire.
Il est d’ailleurs à observer que si les maçons sont devenus, par la langue anglaise, des Freemasons (Francs-Maçons), ils restent des Free Masons (Maçons libres) lorsqu’il s’agit de leur adjoindre le qualificatif de Accepted : acceptés. Donc,
A free and accepted Mason est-il Un Franc-Maçon accepté, ou Un Maçon libre et accepté ? That’s the question ?
Une question, sans doute, sans réponse…
• Pour en savoir plus, consulter tout dictionnaire bilingue français-anglais, ou anglais-français ; et méditer.
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