Nouveau numéro des Saisons d’Alsace : un monde de mystères et de fantasmes, la franc-maçonnerie
Dans leur nouvelle livraison de ce début d’année, Les Saisons d’Alsace se plongent dans la riche et passionnante histoire de la franc-maçonnerie en Alsace. De ses origines, au début du XVIIIe siècle, à nos jours.
La franc-maçonnerie est une terre de fantasmes. Depuis son apparition à Londres, il y a un peu plus de trois cents ans, cette société philosophique et philanthropique, héritière spirituelle des bâtisseurs de cathédrale, a déchaîné les passions et cristallisé les rancœurs. Son côté secret, ses rituels, son recrutement, son influence supposée, ou pas, sur le fonctionnement des institutions alimentent de nos jours encore les théories complotistes les plus farfelues. Les « francs-macs » dirigeraient le monde, manipuleraient les opinions, feraient et déferaient les gouvernements.
Loin des clichés rabâchés par les « news magazines », Les Saisons d’Alsace retracent une autre histoire. Celle, fascinante, de cercles de réflexions, et de lieux d’influence aussi, nés à une époque où Strasbourg était un bouillon de culture.
Véritable carrefour européen, la capitale alsacienne accueille alors négociants et penseurs, intellectuels et soldats. Le Siècle des lumières est propice aux échanges et à l’ouverture, à la révolution des idées. Bientôt les loges se multiplient, elles travaillent en français et en allemand, comme celles de Saint-Jean de Hérédon (1757), accueillent des ressortissants venus de toute l’Europe. Le recrutement est élitiste et les ateliers sont rapidement un puissant vecteur de progrès social.
Si Strasbourg est logiquement la porte d’entrée de la franc-maçonnerie en Alsace, le mouvement prend vite ses aises. La tradition maçonnique s’ancre à Colmar où est fondée, en 1775, la loge La Concorde qui recrute parmi les membres du Conseil souverain d’Alsace. À Mulhouse, ce sont les industriels protestants de l’époque qui allument, en septembre 1809, les feux de La Parfaite Harmonie. Ils joueront un rôle décisif dans le développement industriel et social de la cité.
La suite ne sera pas, on le sait, un long fleuve tranquille. Après la Révolution, derrière laquelle certains devinent la main des francs-maçons, la Terreur viendra mettre un coup d’arrêt à ce développement. Le temps de la chasse aux sorcières était revenu. Il fallait se cacher, déjà. Compter les morts, comme Philippe-Frédéric de Dietrich, premier maire de Strasbourg, qui finira sur l’échafaud. Les persécutions recommenceront, plus tard.
Mais la franc-maçonnerie toujours renaîtra. Pour atteindre son apogée, une première fois, mais de façon très ambiguë, sous un Empire napoléonien qui avait posé sa grosse patte sur les loges. Une deuxième plus sûrement sous la Troisième République, un peu avant même. Avec la promulgation d’une série de lois de progrès (abolition de l’esclavage, interdiction du travail des enfants, laïcité, école libre et gratuite, livrets d’épargne, etc.).
C’est cette histoire, passionnante, riche, puissante, que racontent Les Saisons d’Alsace.