Mensuellement, le Grand Maître du Grand Orient de France s’exprime dans une lettre intitulé « Libres Propos du Grand Maître » : celle de novembre 2011 évoque « la résurgence de fondamentalismes religieux chrétien et musulman, qui doivent être considérés et traités de la même manière » et la distinction à faire entre la liberté religieuse et la Laïcité.
Le Grand Maître conclut par « la crise systémique, morale et sociale, que nous vivons met en danger toutes les libertés dont la liberté de s’exprimer, mais aussi de penser et bientôt d’être.«
Libres Propos du Grand Maître – Guy Arcizet :
« Dans notre pays même, la liberté d’expression est remise en cause, voire en danger.
Trois événements récents illustrent cette dérive.
Sur la place du Châtelet des intégristes chrétiens manifestent devant le Théâtre de la Ville, molestent des spectateurs, et troublent les représentations d’une pièce de théâtre, que, pour la plupart, ils n’ont pas vue.
Ce 2 novembre, nous apprenons l’incendie criminel dont a été victime le siège du journal Charlie Hebdo, lourdement menacé, par de courageux anonymes, pour avoir publié une satire sur Mahomet.
À Nouméa, en octobre, un distributeur de films, approuvé par des politiques, à censuré la projection d’un film sur la prise d’otage sur l’île d’Ouvéa en 1988, au motif qu’il pourrait «provoquer des troubles ».
À des degrés divers, ces entraves répétées à un droit fondamental et à une liberté républicaine inquiètent et pour plusieurs raisons. D’abord par ce que, dans deux de ces circonstances, se manifeste la résurgence de fondamentalismes religieux chrétien et musulman, qui doivent être considérés et traités de la même manière. On doit ici s’interroger sur la « liberté religieuse » trop souvent confondue de nos jours avec la laïcité dans le discours de politiques qui ouvrent ainsi une boîte de Pandore, en donnant à ce fait spiritualiste, partiel mais indéniable qu’est la religion, une légitimité dans l’expression de son particularisme dans le domaine public. Nous ne confondons pas la religion et ses excès, mais ces derniers sont à l’affût de toutes les failles de nos sociétés. La loi républicaine qui devrait nous protéger ne joue plus son rôle et l’indignation sélective de laïques, qui se revendiquent comme tels, accentue le phénomène quand, sur le territoire français, certaines racines sont plus et mieux reconnues que d’autres.
La censure d’un film politique est apparemment d’une autre portée. Mais ceux qui s’y livrent profitent aussi de la détérioration du climat social et de l’expansion d’un sentiment d’insécurité. Des individus isolés, mais aussi des groupes, et c’est ici que l’on rejoint les deux premiers cas, se croient alors autorisés à dire l’ordre et la morale.
Au dernier conseil j’ai attiré l’attention de mes frères sur notre nécessaire vigilance et implication en arguant de ce que l’institution maçonnique n’est pas seulement un rempart ou une protection pour la libre conception de la loge, mais aussi, dans une dimension reconnue depuis deux siècles, un corps républicain ouvert sur les problématiques de la société. La crise systémique, morale et sociale, que nous vivons met en danger toutes les libertés dont la liberté de s’exprimer, mais aussi de penser et bientôt d’être.
Plus que dans les périodes précédentes notre affirmation du fait laïque dans la reconnaissance et le respect de l’autre doit être claire.
Nous aurons dans les semaines qui viennent, lors de la commémoration de la loi de 1905, l’occasion avec toutes nos loges de le dire à nos concitoyens et à nos élus, avec détermination.
Guy ARCIZET