MISCELLANÉES MAÇONNIQUES par Guy Chassagnard
En franc-maçon de tradition, attaché à l’histoire de ce qui fut jadis le Métier de la Maçonnerie avant que de devenir la Maçonnerie spéculative des Maçons libres et acceptés, notre frère Guy Chassagnard met en chroniques ce qu’il a appris dans le temple et… dans les textes ; en quarante et quelques années de pratique maçonnique. Ceci selon un principe qui lui est cher : Apprendre en apprenti, comprendre en compagnon, partager en maître.
Chronique 251
1786 – Les Grandes Constitutions (écossaises…)
« Nous, Frédéric, par la grâce de Dieu, Roi de Prusse, Margrave de Brandebourg, Souverain Grand Protecteur, Grand Commandeur, Grand Maître Universel et Conservateur de la très Ancienne et très Respectable Société des Anciens Francs Maçons ou Architectes Unis, autrement appelée Ordre Royal et Militaire de l’Art libre de tailler la pierre ou Franche Maçonnerie,
« À tous les illustres et bien-aimés frères qui ces présentes verronto: Tolérance, Union, Prospérité… »
Ainsi commencent les Grandes Constitutions de 1786, prétendument signées par Frédéric II, roi de Prusse, le 1er mai 1786, en son palais de Sanssouci, à quelques semaines de sa mort.
Ce texte est composé d’une Ordonnance Royale portant sur l’Art libre de la Franche Maçonnerie et des trente-huit articles des Constitutions et Statuts des Grands et Suprêmes Conseils.
Conscient des grands désordres qui mettent en péril l’Ordre maçonnique, placé sous sa protection et son commandement, le Roi-Philosophe a décidé « d’assembler et de réunir en un seul corps de Maçonnerie tous les Rites du Régime Écossais dont les doctrines sont, de l’aveu de tous, à peu près les mêmes que celles des anciennes Institutions ».
Ces rites étant connus sous les appellations de : Rit Ancien, d’Hérédom, de l’Orient de Kilwinning, de Saint-André, des empereurs d’Orient et d’Occident, des princes du Royal Secret ou de Perfection, Rit Philosophique et de Rit Primitif, le plus récent de tous.
De par simple décision royale, la Franche Maçonnerie embrassera tous les systèmes du Rit Écossais sous le nom de Rit Écossais Ancien Accepté.
On remarquera que ce qu’on connaît au XXIe siècle sous le nom de Rite écossais ancien et accepté n’est, dans les premières années du XIXe siècle, que Rite ancien, ou Rite ancien et accepté…
Selon les nouvelles Constitutions, tout maçon sera tenu de parcourir successivement chacun des degrés du Rite, avant de parvenir au plus sublime et dernier, savoir celui de « 33e » ou Puissant Grand Inspecteur Général de l’Ordre qui « surveillera, dirigera et gouvernera tous les autres ».
Il sera constitué un seul suprême conseil du 33e – dans chaque nation, ou pays d’Europe – tandis que dans les États composant l’Amérique septentrionale il y aura… deux conseils. Soit, une juridiction en France (pour 26 millions d’habitants), en Grande-Bretagne (12 millions), ou en Prusse (5,5 millions), mais deux aux États-Unis (3,3 millions).
Il n’a jamais été produit de document original des Grandes Constitutions de 1786. Les premières copies sont, à notre connaissance, toutes postérieures à la création du Suprême Conseil du 33e de Charleston (1801) et du Suprême Conseil de France (1804).
Elles donnent à penser que les inventeurs du Rite écossais ancien et accepté ont voulu apporter à leur invention une ancienneté et une légitimité inexistantes qui, avec le temps, a acquis force de loi.
Il est à noter que le texte des Grandes Constitutions ne sera connu, dans son intégralité, que par sa publication, en 1832, par le Suprême Conseil de France.
Mais demandons-nous pourquoi la plus ancienne version du document a été rédigée en anglais par Frederick Dalcho ? Et pourquoi encore Frédéric II de Prusse n’a jamais jugé bon de faire la moindre mention de sa promulgation ?
© Guy Chassagnard – Auteur de :
- Le Dictionnaire de la Franc-Maçonnerie (SEGNAT, 2016),
- La Franc-Maçonnerie en Question (DERVY, 2017),
- Les Constitutions d’Anderson (1723) et la Maçonnerie disséquée (1730) (DERVY, 2018),
- La Chronologie de la Franc-Maçonnerie (SEGNAT 2019),
- Les Annales de la Franc-Maçonnerie (SEGNAT 2019)
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« Si non e vero e ben trovato »