On notera d’ailleurs ce passage « Entrer dans le Grand Orient de France ne suppose pas d’abandonner ses convictions religieuses, de faire preuve d’athéisme, d’afficher son agnosticisme, ou de proclamer son relativisme. Bien au contraire ! Nombre d’entre nous sont heureux de lutter dans la cité pour la rendre plus juste, plus libre, plus fraternelle au côté de membres de la Franc-Maçonnerie. »
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Á nos frères évêques de France,
Devant la sanction dont a fait l’objet le père Pascal Vesin, la Conférence Catholique des Baptisé-e-s, attachée à la constitution d’une opinion publique constructive dans l’Église, ne peut que vous faire part de son inquiétude, tant cette mesure constitue une régression de la liberté de parole et d’opinion dans notre Église à tous.
Tout catholique adulte dans sa foi ne peut manquer de se poser plusieurs questions en découvrant le sort de son frère, démis de son ministère et contraint à des choix qui ne devraient pas être mis en opposition.
La première question concerne la procédure juridique. Cet homme, ce prêtre affirme ne pas avoir été entendu par les autorités romaines, qui n’auraient pas amorcé le moindre dialogue. A-t-il été entendu par les autorités de l’Église en France, ou ce dialogue a-t-il été limité à son évêque et à des membres de son conseil presbytéral ? Mgr J.C.Thomas « imagine » qu’un dialogue s’est ouvert entre Annecy et Rome. C’est à vérifier. S’il est normal que la situation de Pascal Vésin soit examinée par son évêque, elle mérite à nos yeux qu’il puisse aussi y avoir consultation ou appel auprès de la Conférence des Evêques de France. Si oui, les évêques de France ont-ils tenté de se faire entendre de Rome ? Vont-ils faire appel de cette décision ? Ces questions que pose également Mgr J.C.Thomas appellent une réponse claire et rapide. Aurons-nous à rougir, à pleurer des procédures « judiciaires » à l’intérieur de l’Église, de ces procédures dignes des temps médiévaux à l’intérieur de l’Église.
Nous ne demandons pas le nom des délateurs. C’est leur accorder trop d’importance. Mais nous nous indignons du crédit que notre Église accorde à de tels procédés. Une confrontation entre eux et celui sur lequel ils souhaitaient les foudres du Vatican a-t-elle été organisée ? Où ? Quand ? Comment ? Il n’y va pas, que nous sachions, du secret de la confession !
Sur le fond de l’affaire ensuite. Est-il condamnable d’avoir des contacts, des discussions avec des hommes de bonne volonté, qui cherchent l’épanouissement de l’homme dans la liberté et la fraternité ? Est-ce si contraire à l’esprit évangélique ? Entrer dans le Grand Orient de France ne suppose pas d’abandonner ses convictions religieuses, de faire preuve d’athéisme, d’afficher son agnosticisme, ou de proclamer son relativisme. Bien au contraire ! Nombre d’entre nous sont heureux de lutter dans la cité pour la rendre plus juste, plus libre, plus fraternelle au côté de membres de la Franc-Maçonnerie.
Les autorités juives ne reprochaient-elles pas à Jésus de manger avec les publicains et
les pécheurs ? Il serait particulièrement affligeant que Pascal Vésin n’ait pu trouver autour de lui, dans sa propre Église, dans son propre diocèse, une liberté de conscience aussi grande, une table aussi ouverte qu’il ait été contraint, pour nourrir son intelligence et sa fidélité à l’Evangile, d’aller à l’extérieur de sa communauté fraternelle. Qui plus est, notre pape ne vient-il pas de recommander de sortir de nos églises et de nos sacristies pour aller « à la périphérie » ?
Enfin est-il condamnable de fréquenter des hommes et des femmes libres, soucieux de Vérité, de Liberté et de Fraternité ? Est-il acceptable de prétendre que ce serait un » péché grave » aux termes du Droit Canon, alors que fréquenter des dictateurs ou des dirigeants notoirement corrompus, les accueillir dans nos églises, les admettre à la communion – (on en frémit d’indignation) – ne rien dire des milliers de personnes disparues, des enfants arrachés à leur mère pour être distribués à qui en veut, serait sans conséquence ? Une telle duplicité n’est pas supportable.
Cette affaire lamentable peut être, doit être pour l’Église de France l’occasion d’aider notre pape François à réformer profondément la curie et le gouvernement de l’Église. Cette affaire, ce « procès » ne devaient-ils pas être instruits par l’Église qui est en France ? Qu’un fonctionnaire de Dieu, dans quelque bureau doré du Vatican ait pu prendre cette décision sans s’en remettre à l’intelligence de la Foi et à la fraternité sacerdotale des évêques français laisse sans voix !
Enfin, Frères évêques, nous craignons surtout qu’avec cette affaire, notre Église ne témoigne de sa peur et de sa défiance, alors qu’elle est là pour aider à la liberté des enfants de Dieu. Prêtres et évêques risquent encore une fois d’apparaître comme des personnes disciplinées, obéissantes, voire serviles ; et le peuple de Dieu, comme une masse immature. Et l’un d’entre nous, notre frère Pascal, va être touché dans ce qui lui est cher, son ministère de prêtre. Cette dérive est grave. Elle fait partir nombre de catholiques de leur propre Église, car ils ne supportent plus ce type de fonctionnement.
Non seulement il est d’un autre temps, issu de siècles de pouvoir absolu, mais il n’est fondé que sur la peur. Derrière la sanction qui frappe l’un des nôtres, c’est la défiance envers la parole évangélique elle-même qui transparaît. Cette dernière serait-elle si faible qu’il lui faille le renfort d’une discipline d’exclusion ? Pourquoi donner tant d’importance à une appartenance maçonnique qui, si elle doit faire du bien, le fera, et si elle doit faire du mal, n’y parviendra pas pour ceux qui croient au Christ ? La vérité que nous chérissons tant ne peut-elle triompher par elle-même de l’erreur ?
Frères évêques, défendez votre prêtre. Vos frères et vos sœurs dans la foi au Christ espèrent de vous la parole évangélique. Elle suffit.
Fraternellement
Le Conseil d’administration de la C.C.B.F.