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LE PASSAGE MACONNIQUE


C’est ce qu’on appelle le Passage à la Cérémonie par laquelle l’Apprenti acquiert le statut de Compagnon, lui conférant le deuxième degré de l’Art Royal.

Comme l’Initiation, le Passage est un rite… de ça : de passage. Comme celui-là, il comporte les trois temps d’un rite de passage : d’où tu viens, ce que tu es, où tu vas.

Mais contrairement à l’Initiation, la cérémonie de Passage laisse presque toujours un soupçon de déception au niveau Compagnon, le sentiment que ce qui s’est passé était inférieur à ce qui était attendu.

En fait, la Cérémonie de Passage est bien plus simple et sobre que l’Initiation. Si on y réfléchit, ça doit être le cas ! L’initiation marque l’entrée dans un monde nouveau, elle marque le passage de la vie profane à l’expérience maçonnique. Le Passage ne marque que le dédoublement d’une étape. Une marque qui, ayant la valeur de signaler un progrès, une amélioration, une croissance, mais le franc-maçon qui en bénéficie doit déjà commencer à comprendre que ce n’est qu’une petite partie du long chemin qu’il lui reste encore à parcourir, s’il veut atteindre efficacement la plénitude de leurs capacités.

Et, pour que le Franc-Maçon qui passe d’Apprenti à Compagnon n’ait ni doutes ni illusions sur le peu qu’il a fait et combien il lui reste à faire… il commencera par déchanter face à la spartiate Cérémonie de Passage !

Ce n’est pas seulement pour cette raison que la Cérémonie de Passage est si simple. Parce que c’est volontairement simple, court et sans fioritures !

La Cérémonie de Passage ne marque pas seulement un changement de statut, de grade, d’Apprenti à Compagnon.

Le Passage signale avant tout un nouveau style et un nouvel objectif de travail. Ce n’est pas un changement, car le franc-maçon ne doit pas arrêter de faire le travail qu’il a appris à faire en tant qu’apprenti pour commencer à faire un travail de type compagnon. Pas ça. Un franc-maçon doit être apprenti tout au long de sa vie maçonnique. Le Passage souligne qu’en plus du travail que le franc-maçon accomplit en tant qu’apprenti, il doit désormais également commencer à effectuer un nouveau type de travail.

Le Billet n’est pas une promotion. Il s’agit d’un transfert de nouvelles responsabilités, qui s’ajoutent à celles déjà assumées.

Le Passage n’a donc pas pour but d’impressionner, de faire impression. Le Passage, au contraire, entend souligner que l’œuvre du franc-maçon est sobre et persistante et de plus en plus profonde et variée. Le Passage n’est pas une fête. Il s’agit simplement de la délivrance d’un certificat d’aptitude. Le Passage n’est pas une entrée dans la Demeure du Savoir Maçonnique, c’est juste l’ouverture d’une autre porte et l’accès à une autre pièce, pour que le Franc-Maçon, qui auparavant travaillait uniquement dans la chambre des Apprentis… puisse désormais aussi travailler dans la atelier des apprentis.

Le Passage laissera au franc-maçon un arrière-goût légèrement amer de désillusion. Mais c’est à ça que ça sert. Pour que le Franc-Maçon perde les dernières illusions qu’il a encore sur la Franc-Maçonnerie de son passé profane et confirme que son chemin est celui du travail. Plus de travail.

J’ai ressenti cette désillusion lors de mon Compagnonnage. Moi qui ai assisté et participé à des dizaines de Cérémonies de Passage, j’ai vu des dizaines de regards de déception sur les visages et les yeux de mes Frères. Pour certains, la déception est si grande et si lourde que, tranquillement, discrètement, ils s’en vont et décident d’abandonner le chemin que d’autres continuent de suivre. Ce n’est pas sérieux ! Tous les apprentis ne deviennent pas Fellows. Tous les compagnons ne accèdent pas au rang de maître. Et certainement tous les Maîtres n’exerceront pas la fonction de Vénérable Maître. C’est la réalité! Pour certains, le poids du travail est supérieur à ce qu’ils se sentent capables de supporter et d’exploiter. En Franc-Maçonnerie également, la sélection est naturelle… Chacun suit son propre chemin dans la mesure de ses moyens. Même ceux qui décident de s’arrêter à mi-chemin ont déjà parcouru au moins une partie du voyage. Ce gain leur appartient déjà et personne ne le leur enlève.

Ce n’est pas par sadisme ou par inconscience que le franc-maçon subit la désillusion, qu’il risque d’abandonner. C’est parce que cette étape doit être vécue. Le nouveau travail qui s’ajoute semblera, à beaucoup, inutile et inutile. Mais ce n’est ni une chose ni l’autre. Car avec lui le franc-maçon apprendra que, pour être maître de lui-même, il doit être un homme complet. Et il faut le terminer. Grandir et se développer de manière harmonieuse et équilibrée dans tous les domaines. Pas seulement un ou quelques-uns. Surtout, pas seulement où et comment vous le souhaitez…

Pour commencer, vous avez une déception… Mais, si vous avez effectivement bien appris ce que vous deviez apprendre dans la rubrique Apprentis, vous surmonterez vite cette déception ; Bientôt, vous vous souviendrez que, dans la Franc-Maçonnerie, ce qui apparaît est normalement différent de ce qui est et ce qui est est normalement plus que ce qu’il paraît ; Bientôt, il oubliera sa déception et regardera, fera attention, méditera sur ce qui, tout simplement, lui a été montré. Et il agira en conséquence. Et avec cela, ce sera terminé.

Il m’a fallu de nombreuses années pour m’en rendre compte. J’ai passé beaucoup de temps à dire et à écrire que le diplôme de Compagnon était mal fini, que c’était sans intérêt, que c’était une perte de temps, bref, beaucoup de bêtises que les plus grands faisaient la faveur de supporter stoïquement, sans m’en priver. de la possibilité de découvrir par moi-même à quel point ils étaient inadaptés !

Le cycle se répète avec chaque Maçon qui persiste ! Il déchante, il se remet en question, il observe, il travaille, il évolue et… un jour il se rend compte que c’est exactement ce qu’il devait être et faire. Quand tu es enfin prêt à le réaliser.

Je dédie trois vœux à chaque nouveau Compagnon : qu’il accomplisse le cycle que moi et beaucoup d’autres avant moi avons accompli et que beaucoup d’autres accompliront après lui ; qu’un jour, vous vous en rendrez compte, comme moi ; cela ne prend pas autant de temps que moi !


A.S.: