Le Maître du silence
D’après un conte Zen
Il y eut jadis au pays de Chine un moine zen
qui se faisait appeler « le Maître du silence ».
En réalité, ce religieux était un charlatan, un imposteur,
qui avait imaginé ce subterfuge pour vivre confortablement des aumônes
que les villageois lui apportaîent.
Il recevait seulement les jours impairs, commodément installé sur des coussins de soie,
et se contentait de garder un silence obstiné.
Deux compères préchaient à sa place.
Or, un matin, un moine pèlerin attiré par la réputation du Maître du silence se présenta au couvent.
Ce n’était pas un jour de visite, et les deux acolytes interprètes étaient absents.
Le pèlerin aborda le maitre et l’interrogea :
« Maître du silence, éclairez-moi : qu’est-ce que le Bouddha ? »
Ne sachant que faire, le pseudo-maître regarda nerveusement à droite et à gauche,
cherchant vainement ses complices habituels.
Le pèlerin, apparemment satisfait inclina la tête et demanda :
« 0 Maître du silence, éclairez-moi qu’est-ce que le dharma ? »
De plus en plus embarrassé,
le charlatan leva les yeux au ciel pour chercher une vaine inspiration,
puis les baissa vers le sol, découragé. Le pèlerin inclina la tête avec respect et dit encore :
« 0 Maître du silence, permettez-moi une dernière question : qu’est-ce que la grâce ? »
Le soi-disant maître écarta les bras en signe de totale impuissance.
Le moine pèlerin salua trois fois, et se retira.
Sur le chemin du retour, il croisa deux moines qui se dirigeaient vers le monastère
« Mes frères ! s’écria-t-il. Vous allez sans doute présenter vos devoirs au Maître du silence ?
Euh !… oui, firent les moines, surpris et un peu inquiets.
Ah ! quel puits de sagesse ! s’exclama le pèlerin.
Au cours de mes nombreux voyages, je n’aî jamais rencontré son égal. Jugez-en.
Comme je lui demandai « Qu’est-ce que le Bouddha ? »,
il s’est tourne vers l’est et vers l’ouest me signifiant par là
que les hommes cherchent le Bouddha dans toutes les directions, partout où il n’est pas.
Je l’interrogeai ensuite sur le dharma.
Il me répondit en levant les yeux au ciel, puis en les baissant vers le sol,
me faisant comprendre que le dharma n’établit aucune distinction entre le riche et le pauvre,
le puissant et le misérable, que le dharma est égal pour tous.
Enfin, quand je le questionnais sur la grâce,
il écarta les bras, les mains grandes ouvertes.
La grâce en effet est une bénédiction,
qui est distribuée généreusement aux hommes pour les guider sur le chemin de la vie.
Mes frères, quel grand sage, ce Maitre du silence ! »
Source: Anonyme