Faute d’une signification à la portée plus avantageuse et plus proche de celle de la Vertu, notre conscience n’a que le terme de Tolérance à sa disposition pour freiner les débordements de quelque passion primaire.
En fait, la Tolérance n’a jamais offert aucun avantage sinon l’adoption d’une attitude statique. Une métaphore peut la comparer à un despotisme endormi qu’il faut éviter de réveiller, à défaut une quasi-absolue acceptation, maquillée ou dissimulée, pas plus qu’un élan franc du cœur à contrôler pour réduire toute velléité de réaction au silence absolu. D’ailleurs ce n’est pas sa finalité, celle-ci ne servant que de catalyseur de la tempérance à des répliques défensives plus ou moins violentes, au mieux réservées. Par extension, on tolère ce que l’on ne peut empêcher. Celui qui est ‘’tolérant’’, tant qu’il est faible risque fort, à l’inverse de devenir »intolérant » si sa puissance s’accroît. Le terme de Tolérance implique trop souvent, dans notre langage, soit une attitude de politesse ou d’élégance dans le meilleur des cas, soit d’indifférence ou de pitié sinon de mépris dans le pire des cas. Ces sentiments se forment dans une conjecture d’extrêmes positions d’un côté comme de l’autre, si bien que Tolérance reflète une couverture presque avilissante de la dignité humaine pour celui qui est un tolérant forcé et obligé à ne pas s’offusquer. Dans de telles circonstances, nombreux sont ceux qui ne l’ont jamais assimilée à une notion de vertu, mais seulement à un minimum de condescendance imposé au titre du savoir-vivre.
La Tolérance cache souvent sa sœur bâtarde surnommée Tolérantisme, qui n’est autre qu’une option dérivée de la tolérance manifestée par la ruine de tout échange critique. Pour l’adepte de la compréhension et de l’indulgence, réside une situation intermédiaire et paisible, mais tributaire d’une certaine tolérance affichée, dans laquelle ce dernier ne s’aventurera certainement pas dans un plaidoyer, mais plutôt adopter la fuite en se plaçant dans le mutisme. L’indulgence et la compréhension apparentes ne sont autres qu’un comportement systématique de tolérance, c’est-à-dire la déroute de tout débat conciliateur et constructif, un total nihilisme de l’esprit qui conduit irrémédiablement à une atteinte dommageable à la loi morale et sociétale.
La personne humaine ne réclame pas la tolérance, mais seulement le respect des opinions qui ne s’inscrit pas dans un rapport de force, mais seulement dans un rapport d’idée sans l’empreinte d’une idéologie marquée.
Par son art et sa magie, la Franc-Maçonnerie donne une suave saveur à tous les termes qu’elle veut intégrer dans son vocabulaire. Ainsi, elle ne pouvait délaisser celui de Tolérance. Ce choix est-il fâcheux ? Y a-t’il une lecture initiatique de ce mot auquel l’Institution veut donner ses lettres de noblesse, l’ériger en idéal ou en vertu humaine ? Ne faisant plus retour sur son sens profane ou son acception religieuse, essayons alors de décoder son sens maçonnique.
Incontestablement, la Tolérance vue par le vocabulaire maçonnique semble posséder une consistance sémantique plus riche et plus généreuse se mêlant « alchimiquement« à l’Amour et à la Fraternité. Ce ‘’bouillon sirupeux’’ peut se transformer alors en un catalogue de conduites « maçonniquement » correctes. Et si cette alchimie réussit pleinement, les Frères et les Sœurs y trouvent un véritable idéal pour devenir leur Pierre philosophale.
Source : Voûte Royale Des Scots