En Franc-Maçonnerie, les symboles et les rituels servent à mettre à la disposition du Franc-Maçon des connaissances, des thèmes et des valeurs ayant un sens et une importance dans l’idéal maçonnique. Ce que chaque maçon apprend ou n’apprend pas, réfléchit ou ne réfléchit pas, assimile ou n’assimile pas face à ces symboles ou rituels, c’est son affaire. Chacun est comme il est et profite librement (ou non) de ce qui lui est proposé de la manière qu’il comprend le mieux.
Tout au long de son parcours, le franc-maçon est confronté, symboliquement et rituellement, à la mort. De cette confrontation, vous réfléchirez autant que vous le souhaitez ou en êtes capable, et vous en tirerez toutes les leçons possibles. Mais il est important que cette confrontation existe.
La mort – nous la connaissons, même si beaucoup tentent de l’oublier le plus longtemps possible… – est inévitable. Cela arrivera à chacun, chacun à son rythme. Normalement, plus nous sommes jeunes, plus nous éloignons ce sujet de nos pensées. C’est une question désagréable et lointaine à laquelle nous espérons ne pas être confrontés avant des décennies. Si nous nous arrêtons pour y réfléchir, nous serons toujours déprimés et il vaut mieux penser à ce que nous allons faire aujourd’hui, demain, cette semaine et pendant les prochaines vacances…
Cependant, les francs-maçons sont confrontés à la mort et il est sage pour eux de réfléchir à ce sujet. Tout d’abord, parce que le faire alors que la mort n’est pas imminente leur permet de faire rationnellement leur analyse et, sans aucune urgence, d’être en paix avec la certitude qu’un jour elle les atteindra.
La mort fait partie de la vie. Le cycle naturel de la naissance, de la croissance, de la maturité, du déclin, de la mort est présent chez tous les êtres vivants, il est inhérent à la Vie. Plus tôt et mieux nous l’accepterons, plus tôt et mieux nous pourrons profiter et vivre pleinement la vie.
Pour le croyant, la mort n’est pas la fin, mais un Passage. Mais, de ce côté-là, il faut reconnaître qu’il s’agit d’un Passage vers l’Inconnu…
La mort, la reconnaissance de son inévitabilité et, par conséquent, son acceptation, est, dès le départ, un facteur important dans la prise de conscience de l’égalité fondamentale entre nous tous.
La Déclaration universelle des droits de l’homme proclame, dans son art. 1° que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Mais, contrairement à ce qu’il peut paraître, la partie finale de cette proclamation (« en dignité et en droits ») restreint la portée de la première partie de la phrase. Et il le fait bien, car, à proprement parler, tous les êtres humains, bien qu’essentiellement égaux, sont individuellement différents. Certains naissent avec une cuillère en argent dans la bouche, d’autres avec des lits de mauvaise qualité. Certains sont génétiquement doués de santé, d’autres ont le malheur de venir au monde avec des maladies congénitales. Certains sont intelligents, d’autres moins. Certains sont beaux, d’autres moins. Malgré l’égalité proclamée « en dignité et en droits », il faut reconnaître que, pour paraphraser George Orwell dans Le Triomphe des cochons, « certains sont plus égaux que d’autres ». Certains, bénis par la génétique, mais aussi par les conditions sociales, abordent le voyage de la vie avec un avantage. D’autres devront surmonter des déficiences, des insuffisances, de simples coïncidences comme le lieu de naissance ou la position sociale de leurs parents pour atteindre les mêmes objectifs et niveaux beaucoup plus facilement atteints par ceux qui ont eu de la chance dans leur conception et leur naissance.
Que cela nous plaise ou non, malgré l’Égalité fondamentale entre les êtres humains, la véritable, complète, matérielle Égalité n’existe que dans la mort ! La mort est la fin du cycle sur ce plan d’existence pour le millionnaire et le démuni, pour le beau et le laid, pour l’intelligent et le moins doué. La mort est le grand égalisateur !
Comprendre notre finitude et l’accepter, mais aussi comprendre l’Égalité fondamentale qui nous unit tous dans la mort est essentiel pour que nous puissions pleinement comprendre et profiter de la Vie.
L’égalité essentielle de la mort est que chacun, absolument chacun, lorsque ce moment arrive, laisse tout derrière lui : richesses, statut, honneurs, mais aussi dettes, condamnations et disgrâces.
Accumuler des richesses, obtenir un statut, recevoir des honneurs impliquent des efforts, des choix, des renoncements. Il est compréhensible de disposer de suffisamment de biens matériels pour pouvoir offrir à soi-même et à ses proches une vie sûre et confortable et de faire des sacrifices pour y parvenir. Pour beaucoup, renoncer à profiter pleinement de la vie simplement pour accumuler des richesses bien au-delà de cette mesure, qui seront laissées derrière eux lorsque viendra le temps de la mort, ne sera pas une priorité. Il en va de même pour le statut, qui prend fin inexorablement avec la mort physique, et pour les honneurs, qui s’effacent peu à peu dans la mémoire de ceux qui restent jusqu’à disparaître inévitablement, ou, tout au plus, et dans un petit nombre de cas, se limitent à des références dans des livres d’histoire ou dans une spécialité. Même les grands artistes, héros et créateurs, célébrés et dont on se souvient, ne savent pas, après leur mort, qu’ils restent célébrés et dont on se souvient…
Ainsi, la conscience et l’acceptation que notre vie est finie et que, lorsque la mort arrive, nous laissons tout derrière nous, ne sont pas, à proprement parler, douloureuses, elles ne sont pas effrayantes, elles sont libératrices, car cette conscience et cette acceptation nous permettent de vivre et de profiter pleinement de la Vie.
La vie est censée être vécue de la manière la plus libre, la plus puissante et la plus enrichissante possible.
LA VIE EST BELLE! Mais nous n’en prenons pleinement conscience et ne sommes pleinement capables d’en profiter qu’après avoir fait face à notre finitude et être en paix avec notre mort.
Rui Bandeira