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La Grande Armée et la Franc-Maçonnerie

La grande armée de la liberté de Walter Bruyère-Ostells, Jacques-Olivier Boudon (Préface). Ce livre raconte le destins d’officiers napoléoniens qui s’engagent dans différentes révolutions après la chute de Napoléon en 1815. On plonge notamment dans les réseaux francs-maçons.


La première partie est passionnante. On découvre ces aventuriers partis servir au Nouveau Monde. Le récit est bien construit et sans manichéisme. On s’aperçoit de la grande diversité de ces hommes:demi-soldes napoléoniens tombés dans la gêne, aventuriers professionnels de la guerre sans emploi en Europe mais aussi petits escrocs emplis d’ambition. Leurs parcours nous entraînent dans la géostratégie de l’Amérique en construction mais aussi dans le monde interlope des Antilles avec des personnages douteux comme le corsaire Aury.


Après un chapitre sur l’échec de la révolution libérale en Espagne entre 1820 et 1823, la seconde partie est largement consacrée à la guerre d’indépendance grecque. On retrouve une partie des héros de la première partie mais aussi de nouvelles figures comme le colonel Fabvier. Ici l’intérêt repose sur la démonstration de l’apport technique des vétérans napoléoniens et sur les réseaux d’engagement. On plonge notamment dans les réseaux francs-maçons. Là encore, pas de manichéisme mais une présentation des différents ordres maçonniques. Les explications sur la prudence du Grand-Orient aide à comprendre la multiplication à cette époque de sociétés secrètes directement inspirées de la maçonnerie mais beaucoup plus politisées.
Enfin, une troisième partie décrit les révolutions nationales à Paris et Bruxelles en 1830 et les combats malheureux de Pologne et d’Italie en 1830-31. Ces soudaines embrasées révolutionnaires sont encore l’occasion pour d’anomymes vétérans de révéler leur talent militaire ou politique. Pour Paris, on mesure à quel point le peuple est « manipulé » par des élites qui installent finalement Louis-Philippe sur le trône plutôt que de voir la République revenir.


Globalement, ce livre plein du bruit et de la fureur des guerres du XIXe siècle est aussi une analyse, assez pertinente me semble-t-il, d’un monde commun sur les deux rives de l’Atlantique qui partage son désir de liberté et d’idéal national. Les combattants circulent ainsi dans ce vaste espace avec pour espoir le triomphe de leurs idéaux. Le travail fouillé de l’auteur permet de comprendre qu’ils sont très différents les uns des autres par leurs caractères personnels mais aussi par leurs opinions qui vont du républicanisme le plus avancé à des aristocrates éclairés, dans la lignée des Lumières sur le plan politique mais conservateurs sur le plan social.

A.S.: