Le sujet fut très controversé dans notre groupe, chacun n’étant pas forcément d’accord avec les autres, mais cela a eu le mérite d’enrichir le débat. Pour nous l’engagement politique est la participation d’une personne dans la gestion de la vie de la cité.
Comme on dit souvent qu’en Maçonnerie, on s’abstient d’aborder des sujets politiques ou religieux, car le sujet paraît tendancieux. En fait, la Maçonnerie encourage ses membres à s’intéresser aux sujets politiques, mais à titre privé. La Loge, de son côté s’abstient de toute prise de position politique. C’est donc l’individu qui s’engage dans la cité et non l’Atelier*. Pourtant, on discute dans la Loge de sujets de société en évitant toutefois les sujets polémiques liés à l’actualité.
De tout temps, des Maçons se sont engagés dans la société en créant crèches, sociétés d’assurances, cantines scolaires, etc. En tant que tel, c’est un acte politique (bien que discret) qui n’est pas revendiqué au nom de la Franc-Maçonnerie, même si l’initiateur a agi par conviction maçonnique. Par contre, le don des Loges est un marqueur de la volonté de la Grande Loge Suisse Alpina (GLSA) d’afficher une visibilité, c’est en soi un acte politique. D’autres obédiences voisines, par exemple le Grand Orient de France (GOdF), sont alignées politiquement et ont même une étiquette politique. Ces obédiences prennent parti et cherchent à créer des réseaux pour influencer les décisions des élus. Ce n’est pas du tout dans les intentions actuelles de l’Alpina. Globalement, on peut résumer deux approches radicalement différentes :
- On améliore l’individu, et par rebond la société s’améliore (GLSA)
- On améliore la société en influençant la politique, et par rebond l’individu s’améliore (GOdF)
Que peut apporter la Franc-Maçonnerie à la politique ? Sa dynamique de discussion principalement, mais est-ce réalisable ? Lorsque l’on voit l’argumentation des débatteurs politiques actuels qui deviennent de plus en plus « people », on est en droit d’en douter.
De manière générale, nous autres Suisses, sommes encore sous l’influence de l’initiative Fonjallaz, nous restons timorés et même parfois lâches à défendre notre héritage culturel maçonnique. Sous couvert de discrétion, nous n’accomplissons plus rien, comme si l’idéal maçonnique s’était finalement réalisé et que nous n’avions plus de projets tangibles. On voit d’ailleurs souvent fleurir des discussions sur les buts de la Franc-Maçonnerie, comme si ceux-ci n’étaient plus vraiment clairs.
Comment faire profiter la société de notre laboratoire d’idées ? Encore faut-il que nous ayons des idées originales à offrir, car pour le moment il n’y a souvent en Loge que deux pensées contradictoires qui peuvent néanmoins s’écouter et même s’entendre. Notre obédience définit un cadre précis qui permet l’émancipation de la pensée et la soumission de l’ego. Ce cadre n’existe pas du tout dans le contexte politique.
Dire une information, transmettre une idée « en tant que franc-maçon », est-ce crédible ? Cela intéresse-t-il quelqu’un ? Rien n’est moins sûr et c’est probablement pour cela que le Maçon agit discrètement, sans énoncer ses motivations profondes. Cette discrétion pourra nous faire passer pour des éminences grises ou des réseaux secrets, mais il y en a tant d’autres aux motivations bien moins recommandables que cela en est presque banal.
Notre frilosité est peut-être aussi liée aux persécutions « catholiques » qui ont servi à contrebalancer la maçonnerie « anglicane » insoumise à la papauté. Notre visibilité via une manifestation du type « portes ouvertes » (31 Octobre 2009) est probablement la meilleure mise en avant possible, en transparence vis-à-vis de nos détracteurs. D’ailleurs, pourquoi ne pas mettre « franc-maçon » sur sa carte de visite ?
Se mettre d’accord sur un tel sujet n’a pas été facile (même à 3 Frères !) et ceci exprime bien la multiplicité de la pensée maçonnique. La liberté personnelle prônée par la Franc-Maçonnerie est sans doute en opposition avec une vision politique affichée.
A noter en sus de ce résumé, les divers articles parus dans la dernière revue Alpina et qui complètent le traitement de ce sujet.
* Atelier: autre nom donné à la Loge.
Source : La RL le Progrès à l’O:. de Lausanne
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Hum... Vous écrivez "On améliore la société en influençant la politique, et par rebond l’individu s’améliore (GOdF)".
Nous travaillons en Loge à la construction de notre temple intérieur et y abordons également les aspects de la vie sociétale, religieuses sans être des athées stupides et politique.
L'appartenance a des partis prônant haine et discrimination... N'est pas toléré.
Dans les commissions, exteriorisation (journées du patrimoine, Utopiales, tenue blanche... Site http://www.en06.fr, réseaux sociaux) nous exprimons sons idées et participons à l'amélioration de la société. C'est une démarche de la base (le maçons libre dans une loge libre) vers le politique et non l'inverse.
Il y a deux grands systèmes d'organisations politiques de par le monde: les nations et les empires. les nations sont fondées sur la liberté des peuples et la défense de ces libertés. Les empires sont fondés sur l'autorité qui s'appuie sur des croyances, idéologiques ou religieuses et cherchent à les imposer aux autres peuples pour élargir leur assise. Le maître mot des empires c'est la soumission, celui des nations l'indépendance.
La cohésion d'une nation et sa capacité à résister aux agressions des empires ne sont pas liées à son homogénéité ethnique ou linguistique: la confédération helvétique en est le parfait exemple. Les décisions politiques résultent de débats et de compromis entre les opinions, là où l'empire ne veut voir qu'inféodation à sa doxa. Renan disait que la nation est un "plébiscite de tous les jours", c'est-à-dire une adhésion volontaire à un ensemble de valeurs qui reposent sur le droit des gens, "l'habéas corpus" et la liberté de conscience et d'opinion.
De ce point de vue, la Franc-maçonnerie est une nation en réduction. On peut y professer des opinions politiques contradictoires et y connaître des débats animés, parce qui unit les francs-maçons, ce n'est pas une opinion homogène ou des croyances identiques, mais la fraternité (assimilable à celles des armes, car il faudra peut-être un jour défendre son indépendance) et l'accord sur un socle de valeurs communes.
"Liberté, égalité, fraternité" est la devise de la nation française dont l'expression est la République: liberté et égalité sont la base de l'état de droit et la fraternité le ciment qui en assure la cohésion. La devise du GODF et des obédiences qui en sont issues est la même et pour les mêmes raisons.
En accord avec ce commentaire.
La pensée unique et la categorisation caricaturale du FM n'existe pas au GODF ni ailleurs je crois pour avoir pas mal de visité.
Merci pour l'action sociale et sociétale
Bon courage à tous
FRATERNITE