Comme une femme féconde, prête à donner sa vie, une terre productive, un lieu d’accueil capable de faire germer la Vie en elle.
Je me retrouve souvent à associer la franc-maçonnerie au ventre d’une mère, qui élève et porte des enfants.
« La franc-maçonnerie comme le ventre d’une mère » -un article de Chrétien de Rosemunda sur le site expartibus.it
Quelle comparaison absurde, penseront certains d’entre vous, surtout pour tous ces Frères habitués à fréquenter des Loges strictement masculines !
Cependant, je suis une femme et j’ai aussi eu la grande chance d’être mère, cela m’a permis d’avoir la merveilleuse expérience de « sentir » une vie grandir en moi.
Je regarde ma fille et je pense au miracle qui s’est produit. Ensuite, je repense à ma belle expérience de maître franc-maçon et, inexorablement, j’ai envie de faire une comparaison : je suis « né » puis élevé dans un atelier. Je serai toujours sa « fille ».
Le prodige a eu lieu, pas seulement avec moi ; cela se réalise toujours avec tous ceux qui demandent à voir la Lumière.
Au fil des ans, j’ai porté une attention particulière aux personnes qui ont côtoyé l’institution pendant une courte ou longue période. Au début du voyage, le néophyte m’apparaît comme ce point palpitant des tout premiers jours d’une grossesse ; on s’aperçoit qu’il y a de la vie, mais tout est encore devenir.
Tour à tour, toute la Loge éprouve des émotions fluctuantes, l’égarement et la peur, mais aussi l’exaltation et la joie de l’arrivée du nouveau Frère.
Bien sûr, il peut arriver que les choses ne se passent pas bien et que la grossesse soit interrompue pour des causes naturelles et, de la même manière, la néophyte peut abandonner le chemin qui vient de commencer sans raison plausible. Il suffit de laisser.
Mais celui qui résiste dans les premiers jours, qui surmonte les incertitudes et les doutes, perçoit le nouvel état qu’il vit et, avec une grande inquiétude, se met immédiatement à l’écoute de lui-même, s’attardant sur chaque petit changement.
La période initiale est appelée « ajustement », mais, dans la grande majorité des cas, l’ajustement se fait en douceur, de manière tout à fait naturelle. Tout comme lors d’une « grossesse », le temps passe et le fœtus grandit, se renforce et change.
Ce début, que nous tous les maçons avons connu, est le temps de l’attente.
De telles humeurs ne devraient pas vous effrayer, car elles signalent l’excellent travail que fait votre esprit pour s’adapter à la nouvelle réalité. Tout au long du parcours d’ascension de la pyramide maçonnique, il y a une véritable auto-restructuration.
Mais pourquoi tout cela arrive-t-il ?
De même que le corps d’une femme s’ajuste à la vie qui se forme en elle-même, la Loge se prépare aussi à recevoir le néophyte, disions-nous, et, à son tour, l’Initié ajuste son esprit, qui doit s’élargir pour former le « Moi maçonnique » et créer un espace capable d’établir une relation avec l’Atelier.
Les Frères, pour leur part, vivent une forme de « régression positive », qui leur permet de revivre leur initiation, de se souvenir de ce moment unique et beau des premiers jours à l’intérieur du Temple, de toutes les « premières fois » vécues dans franc-maçonnerie.
On retrouve et on revit la relation unique que l’on entretient depuis toujours avec la Loge : un lien semblable à celui qui unit une mère à son propre enfant.
Pour moi la franc-maçonnerie c’est féminin, c’est mère ; pour moi la Loge est féminine, c’est mère.
Ne m’en voulez pas, la mienne n’est pas une forme de protestation féministe.
Dans l’hymne à Isis, trouvé à Nag Hammadi, en Egypte et datant du III – IV siècle avant JC, nous lisons:
Car je suis celle qui est la première et la dernière, je suis celle qui est vénérée et méprisée,je suis celle qui est prostituée et sainte,je suis femme et vierge,je suis mère et fille,je suis les bras de ma mère,je suis stérile, pourtant mes enfants sont nombreux,je suis une femme mariée et non mariée,je suis celle qui enfante et celle qui n’a jamais enfanté,je suis celle qui console les douleurs de l’accouchement.Je suis la mariée et le marié,Et mon homme a nourri ma fertilité,Je suis la mère de mon père,je suis la sœur de mon mari,Et il est le fils que j’ai rejeté.respecte-moi toujours,Car je suis celui qui scandalise et celui qui sanctifie.
Tous ces symboles liés à la Grande Mère, qui sont liés aux propriétés du « maternel », se caractérisent par une double nature, positive et négative, celle de la « mère aimante » et, en même temps, de la « terrible » mère ».
Je ne peux que percevoir le plaisir d’être ensemble, sans discuter, simplement parler joyeusement. Une proximité qui unit et ne divise pas, qui nous fait comprendre que nous sommes tous enfants de la même mère.
Le sens de la Loge Mère est d’un lien fort.
L’appartenance à la franc-maçonnerie le sera toujours.
La Loge Mère sera unique, tout au long de la vie maçonnique. Vous pouvez changer d’Atelier, vous pouvez changer d’Institution, vous pouvez être réinitié pour certaines règles qui ne permettent pas à une Institution d’en reconnaître une autre, vous pouvez entrer dans des Corps Rituels et avoir d’autres initiations, mais la première Loge, votre Loge Mère, est toujours et seulement cela, pas d’autres.
La relation qui s’est construite est viscérale et vous la ressentirez toujours, même si les circonstances de la vie vous amènent à en changer ou si votre Loge de mère deviendra marâtre, car, peut-être, certains frères déménagent, d’autres partent encore et les nouveaux arrivent.
Ceci, cependant, vous fera comprendre la profondeur et le caractère sacré de la relation construite dans cette session lointaine où vous êtes devenu Apprenti, juste là, dans cette Loge particulière, où vous êtes né Franc-Maçon et où vous avez dit vos premiers mots et nulle part ailleurs .
Et si vous revenez des années plus tard en tant que visiteur, vous vous rendrez compte, même si physiquement les Frères de l’époque ne devaient plus être là, que ce lien fort est resté.
Et, surtout, que l’Atelier ne vous ait jamais oublié, car il conserve les traces de votre passage, pour un tableau écrit par vous et conservé dans le Livre de la Sagesse ou pour une photographie prise dans un moment de partage.
Tout simplement parce qu’une mère n’oublie jamais un enfant.