C’est un article fort bien construit et fort intéressant qui est paru hier, 12 septembre 2010, dans l’éditorial de Champagne Ardennes Picardie « L’Union – L’Ardennais » qui évoque la période difficile pour les francs-maçons (entre-autres) sous le gouvernement de Vichy.
Temps où la franc-maçonnerie était le bouc émissaire de tous les maux de la France.
Extrait de « Le Temps des boucs émissaires » de Hervé Chabaud
S’appuyant sur les déclarations du général Weygand qui fustige : « les compromissions maçonniques » qui ont conduit le pays au bord de l’abîme, le gouvernement de Vichy s’emploie à en identifier les responsables et entreprend à leur encontre une propagande de marginalisation. Des noms sont jetés en pâture, on accable les frères à l’origine de toutes les cabales qui ont porté préjudice à la France. On accuse Chautemps, Daladier, Auriol, Zay, Cot et combien d’autres d’être les complices objectifs de l’affaissement du pays. Il s’agit de promouvoir la loi du 13 août 1940 qui porte dissolution des sociétés secrètes. Si le nom de la franc-maçonnerie n’est pas écrit, elle est pourtant la première visée. Les commentaires sont plutôt enthousiastes : « Enfin ! », « Le Maréchal a supprimé une secte antipatriotique et antireligieuse, agissant dans les ténèbres contre les meilleurs Français ». Les bulletins paroissiaux accueillent avec bienveillance une législation destinée à épurer la société des comploteurs et des auxiliaires de la manigance. On prépare la dénonciation de tous les dignitaires des loges et une priorité est donnée à l’établissement des listes des frères de 33e, 32e, 31e et 30e grades.
On fabrique bel et bien des boucs émissaires et le gouvernement inscrit dans le temps la révélation au public de leurs noms ! Cette démarche haineuse est patente puisqu’on se propose sous le prétexte d’informer de livrer les coupables : « Français ! Voilà les meurtriers de la France ». Vichy se hasarde sur un terrain bien instable d’autant que les archives du Grand Orient comme de la Grande Loge de France ne sont pas en sa possession et que la plupart des documents ont été détruits pendant l’exode. Vichy qui ne fait guère de cas d’un courrier du Grand Orient antérieur à la loi évoquant la suspension de ses travaux, définit de fait des catégories de réprouvés.