Communiqué de la Grande Loge de France (GDF)
L’abattage des deux statues de Victor Schoelcher à Fort de France et Schoelcher en Martinique, le 23 mai, jour anniversaire de l’auto-proclamation de l’abolition de l’esclavage dans l’île, fait réagir le Grand Maître de la Grande Loge de France qui, bien au-delà d’un simple acte de vandalisme, y voit une démarche intentionnelle et construite pour exacerber les tensions en cette période difficile pour tous.
L’émancipation de l’humanité est l’oeuvre de tous les hommes. L’histoire voit émerger des visages qui la font basculer. Schoelcher est de ceux-là. Il réussit à obtenir de la République le décret d’abolition définitive de l’esclavage le 27 avril 1848, soit 15 ans après l’Angleterre et l’abolition bill, mais 300 ans après la controverse de Valladolid.
Il n’aurait pu aboutir sans l’action locale et la portée des révoltes à Saint Domingue ou Haïti et celle d’autres figures comme un Toussaint Louverture ou l’esclave Romain. La Martinique s’impatiente dans l’attente de cette décision qu’elle ignore encore et la décrète, elle-même ce 23 mai.
Loin de vouloir occulter les nombreux actes de résistance, souvent héroïques, qui ont été menés par les esclaves eux-mêmes, le devoir de mémoire ne doit pas non plus laisser ignorer l’influence déterminante des acteurs de la révolution de la pensée humaniste, fille des Lumières, tels Victor Schoelcher ou plus tard Félix Eboué.
L’égalité entre les hommes est une valeur fondamentale pour laquelle la lutte n’est pas finie et doit se poursuivre en bien des points du globe. Il est encore des lieux d’asservissement des hommes par d’autres. Nous avons encore à combattre pour la dignité de l’homme, l’autonomie de sa conscience et le respect de sa vie.
Opposer les hommes entre eux ne peut que retarder l’avènement d’un monde libre et fraternel. C’est pourquoi, par sa valeur symbolique forte, le renversement des statues de Victor Schoelcher doit être vigoureusement condamné et ce message pervers rejeté.
Retenons plutôt le symbole de la mission conjointe des 3 députés envoyés par le Commissaire de Saint Domingue à la Convention en 1794 : Jean-Baptiste Belley, le noir, Jean-Baptiste Mills, le mulâtre, et Louis-Pierre Dufay, le blanc.
Pierre-Marie Adam
Grand Maître de la Grande Loge de France