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FRANCS-MAÇONS : DES AMIS COMME CEUX DE L’ENFANCE ?


Le groupe de francs-maçons discutait avec désinvolture. La réunion formelle était terminée, le repas qui avait suivi avait également été apprécié de tous. La conversation s’est déroulée naturellement. Bien que partant du sujet qui avait lancé le débat, chacun s’en éloignait, selon le cours de ses pensées. C’était un groupe d’amis qui discutaient. Comme n’importe quel autre groupe d’amis. La différence la plus notable était peut-être l’absence de bruit de fond provenant de la diaphonie. Même détendus, ce groupe de francs-maçons pratiquait la règle selon laquelle ils parlaient un à la fois, à l’ensemble du groupe, et chacun attendait son tour pour donner son avis.

La conversation s’est rapidement tournée vers le sens que ce groupe, la Loge, avait pour chacun. Ce à quoi tout le monde s’attendait. De ce que chacun voulait qu’il soit, qu’il fasse.

Chaque intervention était différente de la précédente. Même en étant d’accord avec ce qui avait déjà été dit, quelque chose de nouveau était toujours ajouté, une subtilité, une nuance, un élément, qui rendait différent ce qui était déclaré similaire. Rien d’extraordinaire dans ce groupe. Il en était ainsi depuis longtemps et c’est ainsi que s’est forgée son identité. Les nouvelles personnes qui ont rejoint celles qui étaient déjà sur place ont rapidement appris comment fonctionnait le groupe. C’est à travers la présentation successive d’opinions, de positions, de suggestions, jamais complètement coïncidentes, parfois diverses et apparemment inconciliables, que, lentement, naturellement, sans effort, s’est dégagée la synthèse que chacun a fini par adopter comme position commune, acceptée et respectée par tous. . . Parfois, ce n’était pas facile. Parfois, cela durait plus longtemps. Parfois, cela impliquait deux, trois, quatre, quelles que soient les conversations nécessaires. Mais, tôt ou tard, cette position communément adoptée finissait toujours par émerger.

La conversation s’est développée sur un sujet qui n’était pas nouveau. Les plus âgés du groupe savaient qu’il était abordé et renouvelé de manière cyclique. C’était naturel. Le groupe changeait, se renouvelait, il y avait toujours de nouveaux membres qui n’avaient jamais abordé la question. Le sujet était que faire avec le groupe. Et comme toujours, cela dépendait des attentes de chacun…

L’un préférait socialiser. Un autre a davantage apprécié le rituel. Un troisième attachait une grande importance à la bienfaisance. Une autre personne a beaucoup aimé présenter son travail. Il y en a même un autre qui a déclaré avec insistance que ce qu’il cherchait, c’était que ses idées préexistantes soient contredites, afin de pouvoir continuellement tester sa pensée et ainsi vérifier quand il devrait changer d’opinion. Un autre encore, non moins catégorique, a précisé qu’il considérait comme ennuyeuses les réunions au cours desquelles il n’apprenait rien de nouveau. Mais cependant, il ajouta bientôt que, même s’il savait qu’il y avait des réunions dans lesquelles il n’apprenait rien de nouveau et que cela lui ennuierait, il aimait toujours y aller et… il ne savait pas comment, ceux-là aussi finirent par lui être utiles.

Et ainsi ils continuèrent à parler, comme certains d’entre eux et d’autres avaient parlé auparavant, et d’autres avant eux… Rien de bien nouveau, pensa le vieux franc-maçon, sachant, espérant que, comme toujours, quelque chose de différent finirait par émerger, comme cela arrive souvent. a réussi.

C’est alors que l’un d’eux, quelqu’un avec des mots pas très compliqués, plus à faire qu’à parler, quand ce fut son tour, dit que ce qu’il allait dire, il l’avait entendu d’un autre membre du groupe, qui n’était pas présent. ce jour-là, mais c’était exactement ce que j’ai ressenti.

Et puis il a dit : la loge est cet endroit où l’on peut avoir des amis comme ceux d’enfance.

Le vieux franc-maçon se renversa dans le fauteuil sur lequel il était assis et sourit intérieurement : la synthèse de cette nuit était trouvée !

Ce franc-maçon, qui n’était pas particulièrement doué pour la parole, mais qui exprimait l’idée mieux que les meilleurs orateurs, avait et a absolument raison. C’est précisément ce dont se targue d’être une Loge maçonnique : un lieu où l’on peut retrouver des amis comme ceux de l’enfance, un bien précieux que la vie et les soucis de l’âge adulte nous privent généralement de renouveler. Les amis comme ceux de l’enfance ne se font généralement que dans l’enfance – et c’est une des raisons pour lesquelles on se souvient souvent de cette période de la vie avec nostalgie… Après l’enfance, on peut se faire des amis, on se fait des amis, mais à proprement parler, ces nouvelles amitiés ont peine à se faire. ont la même pureté, le même désintérêt, le même naturel que les amitiés d’enfance.

Mais, ce franc-maçon le lui rappelait à juste titre, et l’autre franc-maçon dont il parlait l’avait déjà remarqué, là, dans la Loge, on découvrait un endroit où, après tout, on pouvait avoir des amis comme ceux d’enfance.

Et c’est une partie importante et essentielle de l’essence de la franc-maçonnerie.

La prochaine fois qu’un profane me demande ce qui fait qu’un groupe d’hommes adultes se réunissent si souvent, s’éloignant de leur famille, de leurs tâches, de leur repos, je sais enfin comment je peux lui répondre, pour qu’il comprenne : nous nous réunissons. A Loja, nous aimons faire cela, car c’est un endroit où l’on peut avoir des amis comme ceux d’enfance – et c’est rare, très rare et précieux !

Dans Blog « A Partir Pedra » – Texte de Rui Bandeira (20.01.2010)

A.S.: