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FRANCS-MACONS… C’EST DEVANT QUE CELA SE PASSE ! – JEROME TOUZALIN


Voici un petit texte de Jérôme Touzalin, Grand Maître de la GLEM (Grande Loge de l’Europe et de la Méditerranée.) …qui est un peu affecté par un certain immobilisme de la F.M. face à la violence qui parcourt notre société.

Un de nos devoirs n’est-il pas, en premier lieu, d’apprendre la paix malgré nos divergences ?


C’est devant que cela se passe !

     On admet que la franc-maçonnerie spéculative a globalement 300 ans, si l’on prend comme référence l’année 1717, date de la réunion de trois loges à Londres, ou 1723, date de la publication des fameuses constitutions, du non moins fameux pasteur Anderson…

Il faut considérer qu’en ce XVIIIe siècle, le mouvement maçonnique était proprement original, j’oserais même dire : révolutionnaire…

Révolutionnaire était, pour nos amis Anglais, d’accueillir, sur les mêmes colonnes, des nobles et des roturiers, des intellectuels et des manuels, des croyants aux diverses pratiques… rien qui ressemblât aux structures établies dans la société monarchique traditionnelle de l’époque.

On peut comprendre que l’ordre politique et religieux se soient vivement inquiétés face à une approche si différente des rapports entre les humains… et traverser le Channel n’a rien arrangé… en particulier pour les Français.

Depuis ces temps historiques, la franc-maçonnerie s’est fortement institutionnalisée, elle a, peu à peu, pris les habits de groupes respectables et bien présentables qui ne troublent plus guère l’ordre établi ; nombre d’obédiences, se sont transformées en sociétés savantes, en associations humanitaires, en de doctes confréries, quasi religieuses pour certaines, piochant à qui mieux mieux dans les textes sacrés, faisant reparler les prophètes à leur guise, ou encore s’ébattant en de raffinés collèges spécialisés dans le biblique, l’alchimique le philosophique, l’historique, ou, enfin, versant dans des choix politiques non dissimulés…

Toute la FM, étant finalement entrée dans une conformité qui ne dérange plus personne, sauf quand les journalistes veulent jouer à faire peur… ou sauf, encore, pour quelques attardés cérébraux qui voient toujours poindre les cornes du diable derrière nos colonnes.

Il me semble pourtant que la franc maçonnerie, son enseignement primordial, au fond de son âme, n’a pas changé ; la FM est toujours là pour affirmer que tout en assumant la diversité de nos positionnements dans la société civile, nous sommes, indissolublement et prioritairement, des frères et sœurs, et des frères et des sœurs qui ont la volonté d’être unis quoi qu’il advienne.

Il est facile de se retrouver par petits groupes, chacun bien accroché à son idéologie, à sa spécialité, sa ligne partisane ; dès l’instant où l’on est entre soi, il y a moins de problèmes, mais quoi de plus difficile que de faire vivre ensemble, en harmonie collective, tous ces groupes aussi divers ? or s’il est une évidence c’est que l’humanité, c’est la diversité ! inexorablement.

Il n’y a pas de diversité chez les animaux, toutes les abeilles vivent de la même façon, tous les lions vivent de la même façon, tous les aigles vivent de la même façon, chaque espèce applique unanimement des règles qui leurs sont particulières, mais toutes dans le but d’assurer uniquement et exclusivement deux fonctions essentielles : manger et se reproduire, il n’y a que les humains pour se lancer, en plus, à la poursuite d’objectifs les plus divers.

La grandeur de l’homme ce n’est pas de s’allier avec celui qui pense comme lui, c’est de parvenir à vivre en paix avec qui ne pense pas comme lui.

Être humain, c’est être différent, et cela rend violent, et être franc-maçon, c’est aussi être différent, mais, au lieu d’être violent, cela nous rend curieux des autres.

Être Maçon, selon l’injonction bien connue de nos rituels, c’est : « rassembler ce qui est épars », c’est vivre nos différences et y puiser l’énergie qui nous fait aller de l’avant…

Tout fossé, tout mur, tout barbelé, toute frontière, est un retard dans l’avancée de l’humanité, mais toute absence de règles, de limites et d’interdits, est un retour à la barbarie.

C’est au Franc-maçon de travailler à maintenir un parfait équilibre qui permet de vivre dans une société enfin en paix.

Si l’univers, selon les astrophysiciens, est en expansion on voit bien que, depuis les origines de l’humanité, le parcours de l’homme l’est aussi.

Il y a résolument deux camps, ceux qui font le pas de côté du « compagnon franc-maçon », qui partent à l’aventure, heureux d’apporter, dans leurs bagages, leurs propres richesses, de les offrir, et, une fois arrivés, de découvrir toutes celles des autres et de s’en inspirer.

Et il y a ceux qui restent emmitouflés chez eux, se cloitrent, montent des murs, électrifient des clôtures, se cachent dans des abris, opposent des lois et livrent une guerre sans merci à tout ce qui vient d’ailleurs… je crois qu’il faut les plaindre, ce sont des angoissés qui croient survivre, se protéger de l’avenir, en refusant tout changement, toute évolution, que ce soit dans les arts, la culture, la modernité technique, l’évolution des mœurs. On n’arrête rien, tout glisse, tout passe, tout va de l’avant, il faut apprendre à maîtriser… c’est-à-dire apprendre à conduire le mouvement. C’est ce que l’on demande aux maîtres maçons… C’est le troisième degré, celui de la maîtrise.

Car la Franc-maçonnerie veut toujours faire entendre que nous sommes tous frères, et que par-delà les clivages, de toutes sortes, le lien de fraternité est ce qu’il y a de plus fort.

Le simple fait d’être vivants doit suffire à nous rassembler, le reste, origine ethnique, origine territoriale, religion, options politiques, ce sont des richesses issues de nos ancêtres, ce sont des chemins de référence, mais ces chemins s’étirent derrière nous et c’est devant que nous sommes attendus :

C’est en ce sens que la Franc-Maçonnerie doit, encore et toujours, travailler et grâce à elle nous pouvons emprunter les voies de la modernité, et ne pas nous transformer en musée du passé : les pyramides, les temples, les cathédrales, c’est très bien, mais ce sont des symboles, tous plein d’enseignements, sans doute, qu’il faut garder à l’esprit, mais c’est au pied de constructions nouvelles que nous sommes attendus.

Exalter ce qui réunit, rassembler ce qui est épars : du Moyen-Orient à l’Europe, en passant par l’Afrique, sans oublier la lointaine Asie, nous devons maintenir éveillée en nous l’ambition humaniste, l’ambition d’entente, de nos pères fondateurs du 18ème siècle.

A.S.:

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