La nouvelle exposition du MUMONS : tout ce que vous vouliez savoir sur la franc-maçonnerie (ou presque) sans avoir jamais osé le demander – un article de Francine Charles dans Magazine CulTurius du 28 décembre 2022
Deux commissaires (Pauline Tisthoud et Romane Duculot) pour une exposition intéressante, instructive, qui vous fera voyager au travers l’histoire de la franc-maçonnerie.
De tous temps, les gens ont toujours voulu se rassembler pour socialiser, échanger et même conspirer. La franc-maçonnerie fascine depuis sa création, elle est même l’une des organisations qui engendre le plus de fantasmes, car elle semble entourée de mystère, de mythes. Or, comme le dit le criminologue français, Alain Bauer, auteur de nombreux ouvrages sur le sujet, si la franc-maçonnerie est discrète, elle n’est pas secrète. Chaque franc-maçon est libre de dévoiler son appartenance à cette association, par contre, il ne peut donner le nom d’autres frères.
L’exposition s’articule en deux parties. Tout d’abord, on évoque l’histoire de la franc-maçonnerie, depuis les chantiers des cathédrales, jusqu’à sa déclaration officielle de 1717. On peut découvrir les valeurs, l’organisation interne, le décorum et les symboles, les temples au travers d’archives et d’objets usuels. Des témoignages de francs-maçons, déçus ou convaincus, permettront de nuancer les propos des uns et des autres.
Une symbolique nourrie à des sources diverses
Chaque membre développe sa propre symbolique, nourrie par des mythes et des récits d’origine biblique, mais aussi historiques (au 19ème siècle, de nombreuses références à la civilisation égyptienne, selon la mode de l’époque, ont été utilisées). Tout cela évitant de développer une pensée « unique ».
Au début, dans une société majoritairement chrétienne, les références bibliques sont nombreuses, mais s’enrichissent également de mythes « agglutinants », c’est-à-dire d’une histoire s’enrichissant d’autres histoires. C’est le cas de tout ce qui touche à la chevalerie, ainsi qu’aux templiers.
Une symbolique puissante
Certains symboles sont communs à toutes les loges. Parmi les plus connus, on peut compter la lune et le soleil, qui marquent le passage du franc-maçon de l’ombre à la lumière, ou encore le temps d’ouverture de la loge. La corde à nœuds, ou chaîne d’union illustre la fraternité, l’œil et le delta dont la signification varie suivant le grade du maçon, ainsi que l’équerre et le compas, outils les plus connus des tailleurs de pierre qui symbolisent les valeurs morales enseignées et transmises.
Les temples sont des constructions savamment élaborées, mais à l’origine, le tapis de loge transformait tout endroit où il était déployé en temple. Celui-ci en bois ou en toile est recouvert de symboles propres à chaque loge et transforme n’importe quel espace en temple, ainsi que je l’ai déjà mentionné. Depuis le 19ème siècle, l’organisation maçonnique mène à la construction de temples dont l’architecture et l’ornementation témoignent de la fonction du lieu.
Chaque temple comporte des éléments récurrents, invitent au libre examen du maçon : pavé mosaïque, pierre brute et pierre taillée, corde à nœuds, astres, outils, trois piliers, les colonnes Jakin et Boaz, le trône du roi Salomon, situé à l’Orient et les colonnes de Jakin et Boaz sont situées à l’Occident. A l’Orient figurent aussi la Lune, l’étoile flamboyante et le Soleil. Le plafond étoilé contient également les signes du zodiaque.
Outre les nombreux symboles, la vie maçonnique est également rythmée par de nombreux rites de passage. Le plus répandu et sans doute le plus connu est « le passage sous le bandeau » qui permet d’introduire un nouveau membre. Les yeux bandés, seul avec lui-même, le membre répond à toute une série de questions. Dans une seconde étape, les yeux bandés et dépouillé de tout signe extérieur de richesse, il subit quelques épreuves symboliques : c’est l’initiation. Ce rituel est censé favoriser l’introspection, comme une « renaissance ». Ensuite, les signes de reconnaissance sont transmis.
Qui frappe à la porte du temple ?
En théorie, n’importe qui peut demander son entrée en franc-maçonnerie. En analysant les listes détenues dans les temples, on peut dresser un profil sociologique plus précis. En général, les francs-maçons sont instruits, et appartiennent à la petite ou moyenne bourgeoisie. On y retrouve également quelques profils plus influents comme les membres des professions libérales, des politiciens.
Mais en dehors du temple, les membres de la franc-maçonnerie sont des gens comme tout le monde, qui mènent une vie personnelle qu’ils essaient de rendre aussi compatible que possible avec leurs valeurs.
D’où vient cette idée que la franc-maçonnerie dirige le monde ?
Au sein des loges, on aborde des questions de société. Les discussions autour de ces questions prennent place dans le cadre de la libre-pensée, valeur clé de la franc-maçonnerie. Les loges ne prennent toutefois pas d’initiative. En revanche, certaines personnalités portent des actions concrètes dans la sphère publique à titre individuel.
La franc-maçonnerie a souvent été rejetée, combattue, par l’Eglise catholique, qui l’a accusé d’être une « contre-religion » ( un contre-pouvoir ??), alors que certains membres du clergé étaient maçons pourtant. Elle a été aussi combattue par l’extrême-droite, le parti catholique, les Rexistes et les Allemands au cours de la Seconde guerre mondiale ont dissout les loges et déportés les francs-maçons qu’ils identifiaient.
Les nazis ont dissout la loge de Mons pendant la guerre, ils ont aussi volé les archives, et se sont approprié les temples.
Alors comment expliquer qu’une association dont les aspirations originelles sont essentiellement philanthropiques suscite autant de négativité et de rejet ? D’après les commissaires de l’exposition, cela serait dus à des dérives occultistes de certaines obédiences. C’est aussi l’avis d’un franc-maçon avec qui j’ai eu l’occasion de dialoguer, suite à la visite de cette exposition. D’ailleurs, il explique la discrétion des maçons belges et français par les persécutions de francs-maçons pendant la guerre 40-45, dont beaucoup ont connu la déportation.
Pour appréhender réellement ce qu’est la franc-maçonnerie, je pense qu’il faut en faire partie. Néanmoins cette exposition, réalisée avec l’appui de la loge montoise, montre à quel point celle-ci a poussé des idées novatrices, en vue de l’amélioration de la société telles que l’acceptation de l’euthanasie, l’émancipation des femmes, et un développement toujours plus grand de l’enseignement.
Le fruit des réflexions de certains maçons semble aller dans le sens d’une plus grande ouverture au monde. Une trop grande discrétion ne faisant qu’attiser les théories du complot.
Personnellement, cette exposition m’a permis d’appréhender toute la richesse de ces démarches philosophiques individuelles, et j’ai également apprécié grandement le fait de ces discussions de thèmes allant dans le sens d’une amélioration de notre société au sein des loges.
Il est indéniable que cette exposition ouvre des horizons, et à défaut de tout comprendre, au moins, les visiteurs sortent de cette exploration avec un regard bienveillant et respectueux des valeurs de la franc-maçonnerie.
Alors si vous avez l’esprit curieux, l’esprit ouvert, rendez-vous au Mumons jusqu’au 1 septembre 2023.
L’exposition Franc-maçonnerie, en toute discrétion , sera accessible au public :
• Tous les jours de 10h à 17h, et le dimanche et jours fériés de 14h à 17h.
• Jour de fermeture : le mardi et le samedi.
• Le musée fermera ses portes durant les vacances d’hiver et le dimanche du Doudou.
Bonjour Madame ,Monsieur
J aimerais tant lire vos articles….mais impossible !!!
Conseillez moi….Mille mercis