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Franc-maçonnerie : Dan Brown en trois points par Cécile Revauger

Pour Cécile Revauger, le livre de Dan Brown « Le Symbole Perdu » est un éloge de la Franc-Maçonnerie…C’est ainsi qu’elle s’exprime lors d’un entretien dans « Sud-Ouest« …

Cécile Révauger (née à Bordeaux en 1955) est professeur des Universités à Bordeaux III. Elle est l’auteur d’une thèse sur la franc-maçonnerie en Angleterre et aux Etats-Unis au XVIIIe siècle, de trois ouvrages sur la franc-maçonnerie, et d’une trentaine d’articles. En collaboration avec Charles Porset, elle a publié des ouvrages collectifs, Franc-maçonnerie et religions dans l’Europe des Lumières (1998 Réédition 2006), Franc-maçonnerie et politique au siècle des Lumières :Europe-Amérique , (2006) Elle dirige actuellement avec Charles Porset la rédaction d’un dictionnaire biographique des francs-maçons, Le Monde Maçonnique à l’époque des Lumières, Europe, Amériques, colonies, qui réunit une centaine de collaborateurs, à paraître aux Editions Champion.

Source : http://www.sudouest.com/accueil/loisirs-culture/livres/article/787424/mil/5412565.html

La multiplication des livres. C’est le miracle annoncé par la parution en France du nouveau thriller de Dan Brown. Et vérifiable en librairies. Ainsi l’arrivée du « Symbole perdu » (1) a-t-elle provoqué une cascade de livres de décryptage qui vont s’atteler à la mission de désenfumage du best-seller (lire encadré).

Les ouvrages ésotériques séduisent de plus en plus de Français. Et le segment « maçonnerie » des librairies est particulièrement fréquenté. Le Salon du livre maçonnique, qui a lieu tous les ans au début de décembre, accueille chaque année 3 500 à 4 000 visiteurs. D’après « Livres Hebdo » (13 novembre 2009), « la franc-maçonnerie génère de longue date une production abondante qui, au-delà des 150 000 maçons français, touche quelque 300 000 personnes attirées par ce monde mystérieux ».

Relent de complot

On peut donc s’attendre à en trouver un certain nombre parmi les acheteurs du « Symbole perdu ». Et quelques-uns prêts à trouver dans le rituel, inventé par Dan Brown, des maçons qui boivent du vin dans un crâne, l’illustration des soupçons distillés par l’antimaçonnisme de Vichy et de la propagande nazie. Ils débusqueront peut-être sous le récit du mélange entre agents de la CIA et personnalités politiques américaines de premier plan ce fameux relent de complot qui accompagne l’histoire de la franc-maçonnerie. Surtout en France d’ailleurs.

« L’histoire du complot maçonnique n’existe pas aux États-Unis », assure Roger Dachez, l’historien de la franc-maçonnerie. Elle est née en France fin XVIIIe, début XIXe. C’est un jésuite, Barruel, appartenant aux milieux émigrés, qui a soutenu la thèse de la responsabilité des francs-maçons dans le déclenchement et l’extension de la Révolution française. C’est devenu un lieu commun alors qu’il y a eu autant de maçons chez les guillotinés que chez les guillotineurs. Et au tournant de la IIe République, les francs-maçons eux-mêmes, pour des raisons politiques, ont fini par accréditer cette idée. Reste que depuis des années les historiens sérieux ont fait litière de cette légende.

Ce que l’on peut dire en revanche, c’est que les loges au XVIIIe siècle étaient peuplées de bourgeois et d’aristocrates libéraux qui ont fait avancer les idées des Lumières. Si la thèse du complot n’a jamais pris outre-Atlantique, celle du crime maçonnique a traumatisé la société américaine durant quelques années du XIXe siècle. Cécile Revauger, historienne de la maçonnerie américaine et professeur à l’UFR d’anglais de Bordeaux 3, raconte l’histoire de la disparition de William Morgan en 1824. « Il aurait été séquestré et jeté dans les chutes du Niagara parce qu’il voulait publier les secrets maçonniques. Cela a déclenché une campagne antimaçonnique avec de grosses pertes d’effectifs et la constitution d’un véritable parti. »

Crime maçonnique

« En France, reprend Gérard Dachez, il y a toujours eu un antimaçonnisme diffus lié à l’opposition de l’Église catholique. » « D’autant, souligne Cécile Revauger, que lorsqu’il était préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, le cardinal Ratzinger avait rappelé qu’un franc-maçon était privé de la Sainte communion. » Quant à Gérard Dachez, il explique : « Traumatisée par la guerre, la franc-maçonnerie française s’est rétractée, alimentant les rumeurs. Elle devrait faire son outing comme aux États-Unis. »

A.S.: