GEO, magazine de la photo et du voyage a publié sur son site internet un article sur Alençon, le temple du protestantisme, paru initialement dans le magazine GEO Histoire d’août-septembre 2021 sur la Normandie (n° 58).
On y apprend notamment ceci :
A la fin de l’Ancien Régime, malgré l’Edit de Versailles de 1787, dit l’Edit de tolérance, qui autorise les mariages protestants, le manque de pasteurs et un isolement grandissant provoquent un abandon massif de leur foi par les protestants, leur retour au catholicisme ou leur participation à la franc-maçonnerie comme « culte de substitution ».
EXTRAITS
Dans son roman La Vieille Fille (1836), Balzac ne mâche pas ses mots : « Alençon n’est pas une ville qui affriande l’étranger, elle n’est sur le chemin d’aucune capitale, elle n’a pas de hasards ; les marins qui vont de Brest à Paris ne s’y arrêtent même pas. » Trois siècles plus tôt, le romancier aurait été surpris. Au début du XVIe siècle, Alençon est en effet au carrefour des routes reliant Paris à la Bretagne et Rouen à Tours.
Elle est la porte d’entrée d’une des plus riches provinces de France, la Normandie, une région stratégique, essentielle par l’activité de ses ports et par sa proximité avec les frontières nord du royaume. D’ailleurs, les souverains en confient uniquement le gouvernement aux princes du sang ou à de très grands seigneurs. Le paysan de la région y a pour devise : « Chacun est sire de soi ». Plus qu’ailleurs s’y affirment, avec le déclin de la féodalité, ces nouvelles forces que sont la bourgeoisie des villes et le pouvoir monarchique.
Les idées nouvelles circulent, à l’image de la Réforme, favorisée à Alençon par l’essor qu’y connaît l’imprimerie. Dès 1529, y circule une traduction du Petit Catéchisme de Martin Luther (1483-1546). Dans ce bref ouvrage, le moine allemand clarifie, pour les rendre accessibles au plus grand nombre, l’enseignement et la parole de Dieu « tels qu’un chef de famille doit les enseigner aux siens en toute simplicité ».
Cette même année, la nouvelle religion a pris le nom de protestantisme. Elle exprime un retour à l’évangile, une individualisation de la piété qui s’oppose aux ajouts de la tradition mais aussi à la hiérarchisation de la société ecclésiastique. On rejette le culte de la Vierge et des saints. On se détourne d’une liturgie catholique surchargée d’images et de symboles compliqués. On redécouvre la parole de Dieu dans sa pureté et son intégralité à travers la Bible, désormais diffusée par l’imprimerie, et qui paraît un livre neuf.
Il s’en faut de peu pour que François Ier n’accorde à la Réforme son soutien. Mais le roi ne peut se permettre de perdre les avantages financiers que lui apporte la perception des bénéfices ecclésiastiques, selon les accords du concordat de Bologne, signé en 1516 avec le pape Léon X. Ces accords règlent, et régleront jusqu’à la Révolution française, les rapports du Saint-Siège et de la monarchie. Le roi de France ne peut donc pas être le défenseur du protestantisme. Ce sera sa propre sœur, Marguerite, duchesse à Alençon, appelée par les poètes la « perle des Valois », qui favorisera en Normandie la diffusion de la Réforme, et qui tentera de réconcilier catholiques et protestants.