Communiqué du Grand Maître du Grand-Orient de France
du 7 décembre 2018
A l’heure où une modification de la loi du 9 décembre 1905 nous est annoncée, réforme sans doute d’autant plus dangereuse et sournoise qu’elle s’appuie sur le besoin d’organiser le fonctionnement du culte musulman et de regagner les territoires perdus de la République, nous devons augmenter notre vigilance.
Rappelons toujours cette phrase si simple et si claire du grand Victor Hugo : « l’État chez lui, l’Église chez elle ».
Les francs-maçons et les laïques ne sont pas des adversaires des religions, ils souhaitent simplement que les croyances restent là où elles auraient toujours dû rester : dans la sphère privée. Le système français de laïcité permet depuis 113 ans une cohabitation pacifique, sans guerre de religions, sans prosélytisme subventionné, sans primauté d’une croyance sur l’autre.
Certes, il reste des exceptions, avec le concordat d’Alsace-Moselle et aussi dans des territoires ultra-marins, mais nous continuerons le combat jusqu’à ce que la loi de 1905 s’applique dans chaque centimètre carré du territoire de la République.
Mais ce soir, mes inquiétudes vont au-delà de cette réforme annoncée, car ce n’est pas que la laïcité qui est menacée, c’est tout l’édifice républicain.
Depuis les dernières élections présidentielles, les partis politiques traditionnels ont explosé. Que reste-t-il des partis de gouvernement traditionnels ? Des ruines, dont la reconstruction est aléatoire. A côté de cela, un nouveau mouvement majoritaire, jeune, inexpérimenté, sans leaders charismatiques au Parlement, peine à être audible.
Ceux qui tirent profit de cette situation, ce sont les extrémistes de tout bord aux discours populistes, qui attirent une population qui a perdu ses repères.
Et comme le monde syndical ne se porte pas mieux, ce sont tous les corps intermédiaires traditionnels qui sont affaiblis.
À côté de cela, a-t-on vraiment pris la mesure de l’état de la population ?
Pour tous ceux qui ont plus de 60 ans et qui ont commencé à avoir une conscience politique après la présidence de Georges Pompidou, le dernier Président qui pouvait dire aux français : « Enrichissez-vous », toute leur vie a été bercée par deux mots : crise et austérité.
Comment peut-on vivre heureux dans ce contexte de morosité permanente où on vous annonce la fin d’un tunnel alors que la montagne ne sera peut-être jamais percée ?
La campagne présidentielle de 1995 s’est faite sur la reconnaissance d’une fracture sociale. Mais qui a cherché à la réduire ? Bien au contraire, celle-ci n’a cessé de s’accroître.
3 millions d’enfants vivent actuellement sous le seuil de pauvreté. Comment pouvons-nous accepter cette situation ?
Alors, à qui la faute ?
Les politiques, qui multipliant leurs mandats électifs et donc les points de contact avec les territoires : communes, communautés de communes ou agglomérations, départements, régions, parlement national et parlement européen, auraient dû sentir la fracture sociale s’agrandir et prendre la mesure de la paupérisation croissante de la population depuis plus de 30 ans.
Avec le mouvement des gilets jaunes, dont la complexité provient de l’absence de leaders et d’interlocuteurs, de l’absence de cohérence dans les revendications, se résumant finalement à un appel au secours : « Ras le bol de cette vie sans avenir ! Aidez-nous ! »
Aujourd’hui, nos institutions sont en danger !
La Révolution Française voulait la fin de la monarchie absolue et de l’accaparation des richesses par la noblesse, mais elle était entourée par des révolutionnaires éclairés et de grands tribuns.
Plus près de nous, mai 68 était un soulèvement de la jeunesse et des classes populaires, mais encadrés par des syndicats puissants et des partis politiques organisés.
Que trouve-t-on dans les gilets jaunes ? Essentiellement, une population sans repère et désespérée emportée par les extrémistes de tout bord.
Là est le vrai danger, car ce peuple en colère est prêt à tous les excès.
Nous avons tous ici été profondément choqués par les dégradations de samedi dernier, et en particulier en s’en prenant au symbole fort de la République qu’est l’Arc de Triomphe, et à la stèle du soldat inconnu, symbole de respect pour ceux qui ont offert leur vie pour que les survivants et leurs descendants que nous sommes puissent vivre en paix.
Le symbole de destruction est inadmissible, mais à côté de cela, pouvons-nous juger de la détresse d’un peuple ?
J’appelle ce soir nos compatriotes à se retrouver autour des valeurs de la République, que sont la liberté, l’égalité et la fraternité.
J’appelle les élus de tous bords politiques à cesser de chercher à récupérer un mouvement dont ils ont aussi la responsabilité.
J’appelle le gouvernement à lancer un Grenelle de la pauvreté et de la précarité, car certaines lois ne sont pas correctement appliquées dans ce pays, et je pense en premier lieu à l’attribution des logements sociaux, mais aussi à l’inégalité devant tous les impôts directs et indirects.
J’appelle les manifestants à la retenue, envers les symboles de la République qui reste le système démocratique ultime qui nous permettra ensemble de surmonter cette crise, par le dialogue et par le respect.
Vive la République ! Vive la France !
Jean-Philippe HUBSCH, Grand Maître du Grand Orient de France
ARRETER L’INFERNALE CADENCE
Ventre qui a faim n’a pas d’oreille
Poches vides conduisent à l’intrépide
La misère jamais ne sommeille
Les serviteurs de la haute finance terrible réveil rapide
Lorsque riches toujours plus riches et pauvres toujours plus pauvres
Alors notre âme sur terre est bien pauvre
FRATERNITE
Bon courage à tous et prudence