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BRÈVES DE COLONNES  N° 5 – CONTRIBUTION DE VABADUS

 

Voici la contribution de Vabadus à notre nouvelle rubrique « loge libre et insoumise »

Vous connaissez probablement Vabadus par ses nombreux articles sur le blog de « La Maçonne » qui visent à la Liberté d’expression et d’une façon plus générale défendent les valeurs humanistes de la Franc-Maçonnerie.


BRÈVES DE COLONNES n° 5

Quand les temples sont fermés, les colonnes bruissent de mots d’humour et de mots d’humeur.

LES MOTS-TABOUS

Il y a des mots que l’on ne prononce pas par superstition dans un bateau ou une scène de théâtre comme on ne passe pas sous une échelle.

 Il y a des mots-tabous qui comme tous les mots sont des symboles mais qui possèdent une charge d’affect qui peut hystériser les hommes ou que l’on évite de prononcer car ils sont porteurs de violence chez son interlocuteur. Ainsi le mot « ROHINGYA » n’a pas été prononcé par le Pape durant tout son voyage récent en Birmanie.

Les mots « Mai 68 » déclenchent chez certains des crises d’hystérie et vous allez vous en rendre compte à nouveau en 2018

Ne pas dire en milieu spirituel, qu’il soit artistique, littéraire, religieux ou maçonnique est une soumission à la pensée de l’autre.

Diderot connut le cachot pour sa liberté de prononcer des mots-tabous interdits par l’Église de son époque.

Molière qui dénonça l’hypocrisie dans le Tartuffe vit son œuvre interdite après sa première représentation.  Il fit s’exprimer Alceste pour traduire ce qu’il pensait de cette soumission à se taire face aux interdits d’expression de la société

Morbleu ! C’est une chose indigne, lâche, infâme,

de s’abaisser ainsi jusqu’à trahir son âme ;

et si, par un malheur, j’en avois fait autant,

je m’irois, de regret, pendre tout à l’instant.

 

LE MOT-TABOU « ROHINGYA » et « l’habileté de la diplomatie vaticane, avec la subtilité que l’on prête parfois aux jésuites. » Le Monde

L’archevêque de Rangoun a recommandé au pape François, en visite en Birmanie  de ne pas utiliser le terme « Rohingya » pour évoquer la minorité musulmane persécutée depuis août 2017, car ce mot est « tabou » dans ce pays. Aussi le Pape rencontrant les chefs militaires, qui ont conservé un poids institutionnel prédominant et Aung San Suu Kyi la Prix Nobel de la paix et chef de fait du gouvernement  qui s’est toujours abstenue de critiquer la répression, n’a pas évoqué devant eux la persécution  à coups d’exécutions sommaires, de viols et de déplacements forcés, à laquelle se livrent les militaires, un  véritable « nettoyage ethnique », condamné par les Nations unies. – voir notre article du 20 novembre 2017 sur ce blog

Le porte-parole du Vatican a expliqué que François ne peut pas « résoudre des problèmes impossibles ». Aussi devant  le conseil Sangha, qui administre les 500 000 moines bouddhistes le pape  a cité le Bouddha : « Elimine la colère avec l’absence de colère, vaincs le méchant avec la bonté. ». Par ces mots on a eu une traduction de ce que Le Monde qualifie  « d’habileté de la diplomatie vaticane, avec la subtilité que l’on prête parfois aux jésuites » !! De toutes les institutions catholiques l’Ordre des Jésuites  est celui qui a les subtilités les plus comiques. Le Pape finira par prononcer le mot-tabou quand il sera au Bengladesh, l’un des pays les plus pauvres au monde, qui a reçu environ 600 000 de ces musulmans qui se sont réfugiés dans ce pays hors de portée des génocidaires

La véritable diplomatie du Vatican a surtout consisté, en écrivant  ici sans tabou, à prendre les devants pour protéger les catholiques qui  résident en Birmanie et qui pourraient être les prochaines victimes de la folie meurtrière des extrémistes bouddhistes. Il est venu pour faire le garde- fous de Dieu en quelque sorte.

Mais on n’a pas entendu non plus le Dalai Lama prononcer le mot Rohingya ni son proche disciple français Martin Ricard qui adhèrent  eux à une branche distincte le bouddhisme tibétain,  et ne se sentent pas concernés par les actions d’une autre branche de bouddhisme de Birmanie.

Enfin aucune foule de musulmans  n’a déferlé au Maroc, en Iran, en Arabie Saoudite et au Pakistan,  en solidarité avec les musulmans persécutés de Birmanie.

Chacun, catholique, bouddhiste ou musulman gère sa boutique !

Brel chantait :

Pour faire une bonne dame patronnesse, Mesdames

Tricotez tout en couleur caca d´oie

Ce qui permet le dimanche à la grand-messe

De reconnaître ses pauvres à soi

Ce qui permet le dimanche à la grand-messe

De reconnaître ses pauvres à soi

 

Et un point à l´envers et un point à l´endroit

Un point pour saint Joseph, un point pour saint Thomas

Un point pour saint Joseph, un point pour saint Thomas

À titre comparatif, 9 mois après son élection le Pape Jean-Paul II va se rendre

en Pologne, nation composante du glacis communiste et sous tutelle soviétique, là où l’emploi d’un mot tabou vous envoyait au goulag. Et en visite au camp d’Auschwitz il dira :

 Si ce grand appel d’Auschwitz, le cri de l’homme martyrisé ici, doit porter ses fruits pour l’Europe (et aussi pour le monde), il faut tirer toutes les justes conséquences de la Déclaration des droits de l’homme, comme le pape Jean XXIII exhortait à le faire dans l’encyclique Pacem in terris. Il faut revenir à la sagesse du vieux maître, Pawel Wlodkowic, et assurer les droits des nations à l’existence, à la liberté, à l’indépendance, à leur propre culture, à un développement honnête.

Ainsi Jean-Paul parlera de Droits de l’Homme et de Liberté là ou la soumission avec l’appui des blindés était la règle. Son message à caractère universel avait été écouté et entendu. François en citant Bouddha en Birmanie a été écouté, mais il n’a pas été entendu.

 

MAI 1968 – MAI 2018  « ATTENDEZ VOUS À SAVOIR… »

 

Une chroniqueuse célèbre dans les années 50 et 60 entamait toujours ses propos sur RTL par sa phrase fétiche : « Attendez-vous à savoir… ».

À l’approche du cinquantième anniversaire des évènements de Mai 68 attendez vous à savoir ce que cette période de la vie française a apporté comme désastre à la France. Il y a eu des « signaux «  faibles de ce qui nous attend avec les réactions des conservateurs patentés qui ont réagi avec brutalité à l’annonce de l’idée du Président Macron de commémorer cet événement au cours de 2018.

Luc Ferry : «Commémoration de Mai 68 : de quoi l’État se mêle-t-il ?» et prêtant au chef de l’État l’intention de « faire un coup à gauche » et se. demandant dans une chronique au Figaro : « La question est tout autre et elle est au fond assez simple: à quoi doit réfléchir l’État quand il choisit de commémorer un événement? Au nom de quoi juge-t-il utile d’intervenir dans les débats d’idées qui agitent la société civile? «.

Henri Guaino. « Les enfants gâtés de mai 68 qui nous ont légué cette société égoïste, cynique et nihiliste sont aujourd’hui devenus macroniens » Pour l’ancien conseiller du Prince cette révolution estudiantine revendiquant un individualisme forcené et le relativisme moral ne mérite pas d’être un exemple.

Éric Zemmour «  Mai 68 a détruit la France traditionnelle »

Laurent Wauquiez : « Mai 68, c’est il est interdit d’interdire, c’est au fond le début de la déconstruction. Moi je crois au contraire qu’il faut reconstruire, redonner des repères. »

Nicolas Sarkozy : « il faut liquider l’héritage de Mai 68 »

 

Mai 68 et l’Église catholique

Henri Tincq rappelait  « René Rémond disait que Mai 68 avait fait en France

trois principales victimes : l’université, le Parti communiste et… l’Eglise catholique :  Mai 68, qui allait saper l’autorité des Eglises, comme d’autres institutions porteuses de sens, de normes morales et prescriptions dogmatiques, trop insérées dans la culture du temps pour ne pas en subir les chocs et traumatismes.

Au sein de l’Église,  les fondamentalistes  se sont fait peur après les évènements comme l’a bien analysé Henri Tincq. Certes dès le départ il y eu ceux qui, comme Jean-Marie Lustiger, aumônier du centre Richelieu à la Sorbonne, ne voyaient dans les événements de Mai 68 que « foutoir » et manipulation et à l’opposé ceux qui comme le Pasteur Paul Ricoeur, le « Maître à penser «  d’Emmanuel MACRON organisait en juin 1968, une « inter-communion » sauvage réunissant  des catholiques et des protestants dans un temple parisien, affirmant:  » Il y a des transgressions qui détruisent, d’autres qui, en détruisant, édifient »

C’est une ligne anti-68 qui sera observée de fait par  Jean-Paul II, Paul VI,  Benoît XVI et le Pape actuel sous contrôle de la Curie.

Henri Tincq constatait l’une des conséquences majeures de la crise de l’Église :

« Une nouvelle  » figure religieuse » émerge, écrit Jean-Louis Schlegel dans le dernier numéro d’Esprit : celle du catholique « qui n’obéit plus, ne conteste plus, part sur la pointe des pieds », celle du « croyant sans appartenance ». (et entre dans les temples maçonniques !)

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/idees/article/2008/05/22/mai-68-un-seisme-dans-les-eglises-par-henri-tincq

 

IL FAUT EFFACER MAI 68 !

Ces hommes au pouvoir politiques dans la droite conservatrice et dans l’Eglise, héritiers des valeurs d’un vieux monde ont voulu effacer Mai 68 pendant 50 ans. ILS ONT PERDU TOUTE INFLUENCE SUR LA JEUNESSE vidant leurs permanences électorales et leurs églises désormais fréquentés par des personnes âgées arcboutées sur la morale des cathédrales et vomissant le Mariage pour tous comme la PMA. On comprend qu’à l’exemple de Luc Ferry ils vont tout faire pour que l’année 2018 enjambe Mai 68.

La mémoire de 68 est un enjeu historique et politique de première importance. La singularité de Mai 68 en France est d’avoir été indissociablement un mouvement étudiant et de la jeunesse radicale, un grand soulèvement de liberté de toute la population là où pendant des décennies le PCF n’y a vu qu’une  grève générale ouvrière. C’est la raison pour laquelle la droite,  l’Église et le PCF voudront en 2018 effacer de la mémoire collective ce qui les dérange.

Dans le contexte politique de la France de 2018 un débat sur Mai 68 sera donc une fonction discriminante d’un clivage droite-gauche ressuscite et notamment dans la dimension essentiellement « CULTURELLE » et mettra en avant la partie  la plus droite et la plus conservatrice des forces politiques  et de l’Église de France.

Ainsi attendez vous à savoir que   Mai 68 est la matrice du relâchement des mœurs, de la perte d’autorité, de l’individualisme irresponsable et du recul du civisme. D’autres vont frapper encore plus fort en reliant  Mai 68 et la chienlit des droits de l’hommisme- immigration- terrorisme et ….de la prolifération des ratons laveurs.

 

DEUX CHANSONS ANNONCENT MAI 68 : « OGINO » contre LA SORBONNE

Elles eurent un grand succès en 1966. L’une, aux paroles réactionnaires de vieille ganache,  vitupérant contre la JEUNESSE  et ses IDÉES DE CHANGEMENT, est chantée par J Halliday.  Elle débute ainsi :

 

« Je veux la liberté

Assis sur son derrière

Avec les bras croisés

Nos pères et nos grands-pères

N’y avaient pas pensé

Sinon combien de larmes

Et de sang évités

 

Da-da-da-da-dam

Da-da-da-da-dam

Mais bien sûr leurs cheveux

N’étaient pas assez longs »

 

Cette chanson  s’intitule « Cheveux longs et idées courtes » et elle est réalisée en RÉACTION à la chanson d’Antoine intitulée « Les Élucubrations d’Antoine » qui disait notamment ceci :

« Oh, Yeah !

Tout devrait changer tout le temps

Le monde serait bien plus amusant

On verrait des avions dans les couloirs du métro

Et Johnny Hallyday en cage à Médrano

 

Oh, Yeah !

Si je porte des chemises à fleurs

C’est que je suis en avance de deux ou trois longueurs

Ce n’est qu’une question de saison

Les vôtres n’ont encore que des boutons

 

Oh, Yeah !

J’ai reçu une lettre de la Présidence

Me demandant: « Antoine, vous avez du bon sens

Comment faire pour enrichir le pays ? »

« Mettez la pilule en vente dans les Monoprix » »

 

Antoine,  diplômé  ingénieur de l’École Centrale a une vision du monde. Halliday et son entourage ont une vision mercantile et ne veulent pas que les fans de l’idole aient l’esprit détourné par des chansons militantes et contestataires. Ces fans  sont constitués par une jeunesse qui a de l’argent de poche  et que l’on doit maintenir dans l’insouciance  afin qu’ils continuent d’acheter des  vinyles. Deux années plus tard Les étudiants de Mai 68 présents à Charlety et au quartier latin ne chanteront pas du Johnny ! « Da-da-da-da-dam » « Da-da-da-da-dam ».


 

 

 

 

A.S.: