La Cellule d’investigation de Radio France revient dans un reportage sur l’organisation criminelle dont les principaux membres appartenaient à une loge maçonnique : la loge Athanor !
Des membres d’une loge maçonnique sont soupçonnés d’avoir commandité des agressions, voire des meurtres, en ayant recours à des mercenaires, d’anciens policiers, et des plantons de la DGSE. Une affaire judiciaire hors normes.
Article « Des contrats criminels déguisés en mission d’État : enquête sur une affaire tentaculaire«
Deux hommes armés arrêtés au petit matin dans un quartier résidentiel de Créteil… Lorsqu’ils ont hérité de l’affaire au creux de l’été 2020, les enquêteurs de la brigade criminelle de la police judiciaire parisienne ne s’attendaient certainement pas à ouvrir une boîte de Pandore. À tomber sur le corps d’un champion automobile enterré dans une forêt de Haute-Loire. À ressortir les photos d’un élu francilien au visage tuméfié. À découvrir que la vie d’un syndicaliste de province ne tenait qu’à un fil.
Ils ignoraient sans doute aussi qu’ils auraient à investir des lieux aussi secrets que sensibles. Une base du service action de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) près d’Orléans, et une loge maçonnique des Hauts-de-Seine dans lesquelles plusieurs projets sanglants semblent avoir été orchestrés. À ce stade des investigations, 12 personnes sont mises en examen. Si toutes restent présumées innocentes, une majorité d’entre elles a livré aux enquêteurs des récits glaçants.
Une « sanglante » bataille politique
L’affaire débute par une querelle politique qui, en 2013, il faut bien l’avouer, ne passionne guère que les militants UMP du Val-de-Marne. Les municipales approchent. Le maire de Saint-Maur-des-Fossés, Henri Plagnol, est candidat à sa réélection. Cet ancien secrétaire d’État de Jacques Chirac, qui a flirté jadis avec le contre-espionnage français, doit faire face à un opposant issu de sa propre famille politique. Le dissident, Sylvain Berrios, accuse le maire sortant d’avoir cautionné un système de fausses factures (1) au profit d’Idéepole, une filiale de la désormais célèbre société Bygmalion.
Lorsqu’ils font campagne sur les marchés de la ville comme sur les réseaux sociaux, les soutiens de Sylvain Berrios s’en prennent aussi à une nouvelle figure de la politique locale, Stéphanie Chupin. Directrice de cabinet d’Henri Plagnol à la mairie, elle a été élue conseillère régionale en 2011. Le compagnon de Stéphanie Chupin, Frédéric Vaglio, aurait alors suggéré de mener une mission discrète de renseignement et de surveillance visant le candidat dissident. La société de sécurité et d’intelligence économique de Vaglio, Meliora (dont Stéphanie Chupin était devenue début 2016 l’actionnaire majoritaire), propose ce type de prestations. Interrogé par la police le 28 janvier 2021, Frédéric Vaglio explique que Berrios aurait ainsi été suivi pendant quelques temps. « C’est la ville de Saint-Maur qui a payé », précise-t-il sur procès-verbal. Montant de la facture : dans les 10 000 euros. « On avait fait passer ça pour un audit de sécurité. »