MISCELLANÉES MAÇONNIQUES par Guy Chassagnard
Chronique 408
1864 – Abd El-Kader, émir et franc-maçon
On l’a dit homme politique, chef de guerre, poète, philosophe, théologien, écrivain, humaniste ; et même sultan des Arabes et commandeur des croyants. Il s’est lui-même présenté comme descendant du prophète.
Nous voulons bien sûr parler d’Abd el-Kader ben Muhieddine (1808-1883) qui, pendant près de vingt ans, se montra un adversaire acharné des Français avant de devenir un ami fidèle de la France ; par ailleurs franc-maçon.
Abd el-Kader eut, dans son existence d’homme, deux vies distinctes ; la première étant celle d’un guerrier, capable d’affronter, avec seulement 10 000 fidèles, les 110 000 soldats du maréchal Bugeaud, et de connaître, sur le champ de bataille, aussi bien la victoire que la défaite.
La seconde étant celle d’un érudit et d’un mystique, capable d’oublier ses échecs passés pour s’élever dans l’honneur et la dignité. Avec un moment de réflexion, sincère et désintéressé, consacré à la Franc-Maçonnerie.
Vainqueur des Français en 1834, vaincu par eux en 1847, et exilé au Moyen Orient après cinq années d’internement, Abd el-Kader est invité par la Loge Henri IV, implantée à l’orient de Paris, à recevoir « son bijou symbolique ».
« J’ai, répond-il alors, le désir réel de m’associer à votre confraternité d’amour et de participer à vos vues dans la généralité de vos excellentes règles, car je suis disposé à y déployer mon zèle ».
La Loge Henri IV demande alors à la Loge des Pyramides, implantée à l’orient d’Alexandrie, en Égypte, de procéder à l’initiation de l’émir en son nom. La cérémonie aura lieu le 18 juin 1864, au retour d’Abd el-Kader d’une visite faite aux lieux saints de l’Islam.
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En franc-maçon de tradition, attaché à l’histoire de ce qui fut jadis le Métier de la Maçonnerie avant que de devenir la Maçonnerie spéculative des Maçons libres et acceptés, notre frère Guy Chassagnard met en chroniques ce qu’il a appris dans le temple et… dans les textes ; en quarante et quelques années de pratique maçonnique. Ceci selon un principe qui lui est cher : Apprendre en apprenti, comprendre en compagnon, partager en maître.
© Guy Chassagnard – Auteur de :
- Le Dictionnaire de la Franc-Maçonnerie (SEGNAT, 2016),
- La Franc-Maçonnerie en Question (DERVY, 2017),
- Les Constitutions d’Anderson (1723) et la Maçonnerie disséquée (1730) (DERVY, 2018),
- La Chronologie de la Franc-Maçonnerie (SEGNAT 2019),
- Les Annales de la Franc-Maçonnerie (SEGNAT 2019)
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Puisque que ce texte de notre TCF Guy évoque le nom de Thomas Bugeaud, que certains n’hésitent pas à qualifier de boucher et croquemitaine du peuple algérien, revenons brièvement sur son histoire…
Longtemps célébré pour son rôle dans la colonisation de l’Algérie, elle est aujourd’hui remise en question en raison de ses méthodes violentes et de ses propos à caractère génocidaire.
Si, sous le Second Empire comme sous la Troisième République, il fut glorifié comme un artisan de l’expansion coloniale française, ses actions — marquées par une répression brutale et des massacres de grande ampleur contre les populations algériennes — interpellent désormais les consciences.
Dans ce contexte, le boulevard Bugeaud à Paris a été débaptisé le lundi 14 octobre 2024 pour devenir l’avenue Hubert Germain, en hommage au dernier Compagnon de la Libération, résistant de la Seconde Guerre mondiale, homme politique et Franc-Maçon de la Grande Loge de France (GLDF).
Ce changement incarne un geste de réconciliation avec le passé et témoigne d’une volonté de promouvoir des valeurs humanistes, telles que la liberté, la fraternité et l’universalité.