Gérard Contremoulin,grand officier délégué, coordonnateur de la communication du Grand Orient de France s’est livré aux jeux des questions/réponses avec l’éditorial « Le Daylineuvième » à l’occasion de l’ouverture du Musée de la Franc-Maçonnerie.
Extériorisation et transparence de la franc-maçonnerie sont au cœur de cet entretien …
Source : http://www.dailyneuvieme.com/2010/02/franma%C3%A7onnerie-.html
Quelles sont les grandes nouveautés de ce musée new look ?
Gérard Contremoulin (photo): En gagnant en superficie, nous avons pu exposer de nouvelles pièces, avec une scénographie qui permet une visite chronologique ou thématique. Le hall a été entièrement restructuré, pour devenir une sorte d’agora. Surtout, la façade retravaillée traduit notre volonté d’ouverture, de transparence. Avant ces travaux, elle avait plutôt des allures de coffre-fort, avec une entrée sur le côté, en sas, qui n’incitait pas le public à entrer. Le changement est net : si les Musées de France nous donnent pour 30 000 visiteurs annuels, nous en avions 3 000, hormis les grands événements. Or, 650 personnes sont déjà venues les trois premiers jours ! Dans le même temps, nous avons lancé une chaîne de télévision.
Cette volonté de transparence n’est pas du goût de tous les Frères…
G. C. C’est une rupture en douceur, une nécessaire évolution, nous avons tout à gagner à montrer qui nous sommes, ce que nous avons fait et ce que nous faisons. Mais il existe une vieille peur, légitime : les premières lois de Vichy ont concerné les francs-maçons, avec l’interdiction des obédiences, la vente des biens, les archives pillées, les temples saccagés… Ce qui explique qu’on a pensé longtemps que moins on en disait, mieux c’était. Contrairement à un énorme fantasme, nous n’avons rien à cacher. Même si nous ne pouvons pas tout dire, non parce que c’est interdit, mais parce qu’il y a une grande part d’intime dans ce que vit un Maçon, c’est une démarche très personnelle.
Mais l’une des grandes critiques qui est faite à la franc-maçonnerie, c’est d’être un puissant réseau…
G. C. Nous ne prenons pas notre téléphone pour dicter telle ou telle décision ! Notre rôle n’est pas de nous substituer aux partis politiques mais de faire réfléchir et de défendre des valeurs, des principes, de prendre position sur des projets, en amont, sur les droits de l’homme, la liberté de conscience, la laïcité… Ces problèmes de réseaux, des scandales qui ont pu éclater sont le fait des fraternelles, créées en dehors des obédiences. Elles n’ont rien de maçonnique, nous avons demandé à nos Frères de les quitter. Mais ils restent libres.
Lors de l’inauguration, (notre article du 10 février), on a noté l’absence de Frédéric Mitterrand, la présence de Laurent Fabius, tandis que seul Jean Tibéri représentait la droite…
G. C. Le ministre de la culture n’est finalement pas venu mais je pense qu’il s’agissait d’une question matérielle. Et c’est grâce à Laurent Fabius que nous avons pu récupérer des archives qui, à la fin de la guerre, étaient parties en Russie. Par ailleurs, nous avions invité tous les parlementaires, les ministres, mais il est vrai que seul Jean Tibéri représentait la droite… Alors que si, dans son histoire, le Grand Orient a été plutôt à gauche, en particulier lors de la création du Parti radical, nous n’avons maintenant plus aucun lien.
…. erratum …
Pourtant, ce musée, même s’il est dans vos locaux et présente vos collections, s’appelle musée de la Franc-maçonnerie. Qu’en pensent les autres obédiences ?
G.C. Le Grand Orient est la loge la plus ancienne et a été longtemps, et de loin, la plus importante. Elle acquiert des objets depuis trois siècles, a gagné une vraie compétence en achats et expertise. Mais c’est aussi le résultat des travaux, nous avons maintenant une salle d’expositions temporaires, où les autres obédiences pourront exposer leurs collections. Nous avons pris des contacts avec elles, il faut maintenant trouver les circonstances.
Quel est le montant de ces travaux, qui les a financés ?
G.C. Ils se montent à 3 millions. L’État, la Région et le Département ont apporté chacun 300 000 euros, nous, le Grand Orient de France, le reste. Mais le coût de fonctionnement est entièrement à notre charge.
Comment peut-on visiter ce musée ?
G.C. Librement, ou avec deux types de visites guidées : celles des musées de France, et celles de la Société des amis du musée. L’occasion de découvrir aussi certains des vingt temples du site.
Et, en avril, il sera doté d’un nouvel espace mémoriel ?
G.C. Nous pensons que sans culture, il n’y a pas de développement possible, et que la franc-maçonnerie peut aider à la création. Pour cela, nous avons lancé un concours annuel qui s’adresse aux artistes de toutes les techniques d’expression, doté par notre fondation de plusieurs milliers d’euros. Le premier concerne la création d’un nouvel espace mémoriel. Il vise à célébrer le souvenir non seulement de nos morts en camps de concentration, mais de toutes les victimes de génocides et d’atteintes aux droits de l’homme.
Propos recueillis par Emmanuelle Cohendet pour le Daily Neuvième