MISCELLANÉES MAÇONNIQUES par Guy Chassagnard
En franc-maçon de tradition, attaché à l’histoire de ce qui fut jadis le Métier de la Maçonnerie avant que de devenir la Maçonnerie spéculative des Maçons libres et acceptés, notre frère Guy Chassagnard met en chroniques ce qu’il a appris dans le temple et… dans les textes ; en quarante et quelques années de pratique maçonnique. Ceci selon un principe qui lui est cher : Apprendre en apprenti, comprendre en compagnon, partager en maître.
Chronique 165
1751 – La Grande Loge des Anciens
Elle a été en activité, d’abord sous la forme d’un simple comité, ensuite d’une obédience, de 1751 à 1813 ; avec un titre distinctif dont on mesurera aisément la complexité : Grande Loge de la très ancienne et honorable Fraternité des Maçons libres et acceptés – selon les anciennes Constitutions délivrées par sa Grâce royale le Prince Edwin, à York, en l’année profane 926, et en l’année maçonnique 4926.
Soit, si l’on veut faire simple : Grande Loge à Londres des Maçons libres et acceptés selon les anciennes Constitutions, ou plus court encore : Grande Loge Ancienne d’Angleterre.
Faisant usage des traditions, des règlements et des symboles des loges d’Irlande, la Grande Loge Ancienne attire à elle, dès ses débuts, diverses loges londoniennes constituées d’immigrés irlandais, demeurées à l’écart de la Grande Loge d’Angleterre – souvent pour des raisons sociales et financières.
Ce qui tend à prouver que celle-ci n’est, en aucune façon – comme généralement affirmé –, le fruit d’un schisme survenu au sein des « Modernes ».
Sous l’impulsion de Laurence Dermott (1720-1791), son initiateur, la Grande Loge connaît un développement rapide, d’abord à Londres, puis dans les villes anglaises de province. D’autant qu’elle sait confier son maillet de grand maître à des seigneurs de cour et de haut-rang.
En 1813, lors de la fusion des Anciens et des Modernes, le grand maître des premiers sera Edward, duc de Kent, quand le grand maître des seconds aura pour nom Augustus Frederick, duc de Sussex – l’un et l’autre étant fils du roi George III.
La Grande Loge d’Angleterre compte alors 347 loges, celle des Anciens 260. De leur union naîtra la Grande Loge Unie d’Angleterre, toujours active de nos jours.
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© Guy Chassagnard – Auteur de :
- La Franc-Maçonnerie en Question (DERVY, 2017),
- –Les Constitutions d’Anderson (1723) et la Maçonnerie disséquée (1730) (DERVY, 2018),
- –Le Dictionnaire de la Franc-Maçonnerie (SEGNAT, 2016).
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Une petite rectification: Les 2 grands maîtres des 2 Grandes Loges des « Modernes » et des Anciens, au moment de la fusion forcée sont les fils de Georges IV et non de Georges III.
Le titre de la nouvelle Grande Loge des « Anciens » est presque exactement le même que celui de l’ancienne Grande Loge existante. Mais ce n’est pas le mot « ancien » qui les différencie. La première Grande Loge était désignée sous le syntagme de « très ancienne et très honorable société des maçons libres et acceptés », alors que la nouvelle parle de « très ancienne et très honorable fraternité ». Le terme « société » renvoie à la forme usuelle d’association à l’époque en Grande Bretagne, alors que celui de « fraternité » à la forme ancien régime des corporations avec l’arrière plan religieux.
De ce point de vue la nouvelle Grande Loge des Anciensrenvoie à une volonté de rechristianisation de la nouvelle Franc-Maçonnerie. Sa fondation suit de près la défaite des jacobites à Culloden qui a sonné définitivement le glas des espoirs de la lignée catholique des Stuarts de monter sur le trône.
La Grande Loge des Modernes étant un ferme soutien de la monarchie protestante des Hanovre et une quasi-institution de la nouvelle monarchie constitutionnelle, celle des Anciens constituait une tentative de la circonvenir.